La seigneurie de Magné
par D. Touzaud 1888

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En visitant la châtellenie de Tusson, nous ne pouvions rencontrer de seigneur laïque, puisque la seigneurie appartenait exclusivement au couvent qui a créé ce bourg. Nous n'avons même pas trouvé sous nos pas une seule maison noble : tous les bourgeois, y compris l'huissier ou sergent, rattachaient à leur nom celui d'une terre ; mais on sait que la particule n'offre par elle-même d'autre signification que de révéler la possession d'un domaine.
Cherchons dans le voisinage une seigneurie. Magné, hameau de la paroisse de Courcôme, à six kilomètres au nord de Tusson, a conservé jusqu'à nos jours sa physionomie extérieure, mieux que Bessé, Ébréon ou Souvigné : son logis est à peu près intact, avec la garenne qui le touche, aujourd'hui encore, il se trouve desservi par ses vieux chemins ; enfin, il se présente, dans son ensemble, comme un coin oublié de notre région.


I. Le hameau de Magné.
MAGNÉ est situé au point de jonction du calcaire litho-graphique kimméridgien, auquel appartient Tusson, au sud, et de l'étage corallien à grosses oolithes, au nord. La portion méridionale de son territoire est propre à la vigne ; celle du nord exclusivement aux céréales. Au-dessous du hameau, dans la direction nord-ouest, se creuse une dépression où des alluvions marécageuses, aux eaux stagnantes, ont formé des tourbes ; elle porte le nom de leigne (Lempnia, bois (Du Cange)); on en a fait des prés médiocres ; au contraire, sur les bords de cette sorte de cuvette, les alluvions en pente constituent des terres fertiles.
A cent mètres des habitations, sur la lisière des bois, se trouve un dolmen dont la table ne repose plus que sur un seul de ses supports ; il a donc été remué, sans doute par des chercheurs de trésors ; aussi les fouilles que nous y avons pratiquées ne nous ont-elles fourni qu'un racloir en silex, un perçoir fait d'une dent de porc et divers débris d'ossements humains.
Le hameau, qui compte actuellement (1888) seize feux et cinquante-six habitants, est séparé de Courcôme par une demi-lieue environ.
La paroisse, aujourd'hui peuplée de 861 habitants, comptait cent vingt et un feux au siècle dernier (1). Courcôme, situé à une distance à peu près égale de Ruffec, chef-lieu d'un marquisat en Angoumois, et de Charmé, qui faisait partie de ce marquisat, appartenait à la Saintonge, élection de Saint-Jean-d'Angély, généralité de La Rochelle, cela, du moins, pour la majeure partie, car une portion de la paroisse, formée de Tuzie et de La Croix-Geoffroy, constitue une enclave ressortissant au marquisat de Ruffec.
(1) En 1767. (Géographie de Dumoulin, tome V.)


Courcôme avait pour seigneur le chapitre de Saint-Hilaire de Poitiers ; cette terre avait été donnée à l'église de Saint-Hilaire par Guillaume, duc d'Aquitaine, vers 970 (2). La seigneurie de Magné relevait du chapitre de Saint-Hilaire.

(2) Archives de la Vienne, O. 788.
Magné est à peu prés à égale distance de Villefagnan, en Poitou, de Raix, Souvigné, Bessé et Charmé, en Angoumois ; il est relié à ces paroisses, comme avec le bourg du Courcôme, par des chemins difficiles à pratiquer. Son territoire est limité à l'ouest par le «grand chemin d'Aigre à Ruffec», plus large, mais qui n'est guère meilleur que les autres ; au sud, par le «chemin de La Rochelle», lieu de passage des maçons du Limousin qui s'en vont au printemps, par bandes de cent cinquante à deux cents jeunes hommes, vers La Rochelle, et en reviennent à l'automne (3).
(3) Il en a été ainsi, du moins, jusqu'à la création des chemins de fer.


II. Le logis et le domaine.
Le logis de Magné présente, d'abord, une suite de bâtiments qui s'appuient à un donjon modeste, sorte de pavillon carré muni d'un mâchicoulis. Le toit du donjon, à quatre pans, est assez aigu ; il est couvert, comme les bâtiments, par des tuiles plates ; la porte d'entrée, refaite au commencement du XVIIe siècle, donne accès, par un passage voûté, dans une cour intérieure ; à côté du passage, le complément du rez-de-chaussée, sous le donjon, est occupé par une chapelle qui n'a que les étroites dimensions d'un oratoire, mais où cependant est érigé un autel.
Du côté opposé de la cour se trouve l'habitation principale, précédée d'un avant-corps très élégant, bâti à la fin du XVe siècle, ainsi que le démontre une accolade de style flamboyant qui s'élève au-dessus de la porte d'entrée.
Cet avant-corps constitue une disposition très commune au XVe siècle. À l'intérieur se développe un large escalier de pierre. On doit remarquer ici l'analogie qui existe entre la construction du logis noble de Magné et celle des maisons bourgeoises de Tusson. C'est à la fin du XVe siècle, lorsque le pays a reconquis son indépendance, après avoir vécu à l'abri de la tour carrée du couvent à Tusson, ou du donjon du seigneur laïque à Magné, que l'élégance s'épanouit sur les façades des habitations : les mêmes accolades s'élèvent au-dessus des ouvertures, chez les Corgnol comme chez les David-Négrier ou les Ithier-Préneuf.
Cette porte donne accès dans un corridor assez étroit, sur lequel s'ouvrent : à gauche, la cuisine avec sa large cheminée, à côté le bac ou évier et le cellier; puis la petite salle ou «salon», à côté la dépense ; à droite, une vaste pièce pavée d'un cailloutis disposé en dessins géométriques, et au fond de laquelle apparaît une magnifique cheminée de pierre : supportée par de légères colonnes, son manteau présente une série de moulures que couronne une guirlande de feuillages et de fruits sculptés entourant un écu sur lequel deux chevrons en relief se détachent coloriés en rouge ; les murs sont blanchis à la chaux et ne gardent aucune trace de boiserie ; c'était la salle, désignée sous le nom de «chambre» (1), sans doute parce qu'il s'y trouvait des lits, suivant l'ancien usage.
(1) Voir appendice , D.

Au-devant du donjon, du côté du nord, se trouve une «ouche» mi-circulaire en forme de terrasse, dominant la dépression du terrain qui descend vers le nord-ouest. Une fontaine coule au pied de la plate-forme ; l'eau passe successivement dans divers bassins, le premier destiné au puisage pour l'alimentation, le second au lavage du linge; un troisième sert de vivier ; le dernier et le plus étendu est accessible aux animaux qui viennent s'y abreuver.
Du côté du couchant, à la suite des bâtiments qui continuent le donjon, et en retour d'équerre vers le sud, s'étendent les étables, granges et constructions diverses destinées à l'exploitation du domaine. Entre ces constructions et le logis se trouve la fuie, de forme circulaire. Du côté de l'est et sur toute la façade du midi s'étendent les jardins, qui eux-mêmes sont continués par une garenne.
En face du logis, de ce côté, le jardin est coupé par une allée d'arbres fruitiers, que continue en ligne droite, à travers la garenne, une large avenue bordée de vieux chênes.
On ne saurait, au-devant du logis inhabité, suivre cette grande allée silencieuse sans la repeupler par la pensée de ses anciens hôtes.
Telle est cette demeure, très modeste en somme, et qui n'a laissé parmi les habitants du voisinage aucun souvenir, si ce n'est une vague image de l'ancien régime. «Ceci, dit-on, appartenait sans doute à quelque noblesse.» Une excellente cave, fort obstruée aujourd'hui, entretient l'idée des souterrains mystérieux, sinon des légendaires oubliettes ; une pièce dans laquelle se trouvent les restes d'un bois de lit à la duchesse est montrée comme étant «la chambre de la duchesse» ; en réalité, c'est une chambre de domestique (1).
(1) Voir appendice, D.

Rien n'est plus curieux que de constater l'éternel oubli dans lequel la Révolution a précipité le passé parmi le peuple ; il a pu en acquérir la haine, il en a totalement perdu la notion.
Le domaine du seigneur de Magné était assez étendu.
Il se trouvait distribué entre plusieurs métairies, dont une, «la métairie de La Porte», qui comprenait les bâtiments d'exploitation désignés plus haut, faisait partie de l'ensemble du logis, suivant l'usage commun à toutes les anciennes habitations de la région.
Le sol, très varié, comprenait des terres, près, vignes et bois pour une contenance totale de sept cent cinquante journaux (1).
(1) Archives départementales, domaines nationaux, Courcôme. (Appendice, C.)

Nous verrons que les seigneurs de Magné le furent aussi, presque toujours, de Fontenille.

III. La famille.
La famille que nous trouvons aux XVe, XVIe et XVIIe siècles, en possession de la seigneurie de Magné, y résidant et en portant le nom, s'appelait Corgnol.
On retrouve dès le XIe siècle un Lambert Corgnol qui marie sa fille Agnès au seigneur de Jarnac ; au commencement du XIIe siècle, Emmanuel Corgnol possède la terre de Mouléde (2).
(2)
Paroisse de Saint-Saturnin. (Voir l'Abbaye royale de Saint-Étienne de Bassac, par M. l'abbé J. Denyse. Bulletin SHAC, 1880, pages 9 et 11.)
En 1409 (3), mous voyons apparaître comme seigneur de Fontenille Aubert Corgnol, fils de Louis, écuyer, seigneur du Vivier Estrains (?).
(3)
Ces renseignements et tous ceux qui suivent sur la famille, à moins d'indications contraires, sont puisés dans l'Inventaire fait après le décès d'Henri Corgnol, en 1667. (Archives départementales, fonds des notaires, minutes de Mourou, notaire à Juillé.)

Corgnol portait :
"d'or à deux chevrons de gueules".

Aubert Corgnol épouse Catherine, fille d'Alain Merle, seigneur de Magné. Alain Merle était, paraît-il, fort ami de Louis Corgnol, car il l'avait désigné en mourant comme curateur de sa fille. Aubert, devenu l'époux de Catherine Merle, prit le double titre de seigneur de Magné et de Fontenille. Dès le milieu du XVe siècle, tout au moins, les Corgnol étaient fortement enracinés dans le pays, car nous voyons en 1457 Marie, sœur d'Aubert, épouser Jean de Riaux (ou des Ruaux), écuyer, seigneur de Rouffiac (1), qui possédait aussi la seigneurie de Moussac, dans la paroisse de Charmé.
(1)
Aujourd'hui commune de Plassac-Roulliac, canton de Blanzac.

A ces titres, Jean, fils d'Aubert, ajouta celui de seigneur du Montet (2) par suite de son alliance avec Catherine Delage.
(2)
Hameau du Poitou, arrondissement de Civray.

Franchissons cent années. A la fin du XVIe siècle, Izaac Corgnol épouse Renée d'Alloue, dame de Bourbon, paroisse de La Faye. Celle-ci reste veuve dés avant 1613, avec un fils, Philippe, et une fille, Florence, qui épouse Étienne de Barbezières, écuyer, sieur de Montigné.
Philippe épouse Émeris de Moret, fille de Pierre, écuyer, sieur des Fenestres, de la paroisse de Charmé.
Il meurt en 1632, laissant un fils, Henri, et trois filles, dont l'une décède en 1650.
Henri Corgnol, seigneur de Magné et de Fontenille, épouse, en 1651, Marguerite Normand, fille de François, écuyer, sieur de Puygrellier, conseiller au présidial d'Angoumois, et de défunte demoiselle Marie Aigron, demeurant à Angoulême. Des deux sœurs survivantes, l'une, Suzanne, épouse Jean Bajol, écuyer, sieur du Breuil-Bernac (commune de Bernac) ; l'autre, Marguerite, Louis de Barbezières, écuyer, sieur de Villesion (1).
(1)
Commune de Nanclars.

Mais Henri Corgnol n'a que deux filles : l'une, Émerye, épouse Henri de Volluyre, chevalier, seigneur de Touchabran, fils de Jean de Volluyre, chevalier, seigneur du Vivier d'Aunac ; la seconde, Madeleine, épouse Antoine Dusouchet, écuyer, seigneur de Villars de Garat.
A la mort d'Henri Corgnol, survenue le 4 mai 1667, Fontenille est vendu, et c'est Henri de Volluyre qui devient seigneur de Magné (2).
(2)
Le domaine du Montet était sorti des biens de la maison de Magné dès 1625 (minutes de Jolly, ler mars 1625). Le fief de Bourbon fut vendu son tour en 1619 (minutes de Gibaud autre, 21 novembre 1684).

En 1722, la seigneurie de Magné passe, avec celle de Touchabran, dans la maison de Bessè par le mariage d'Émerye de Volluyre avec Louis Danché. Jeanne Danché, leur fille, apporte en mariage, à son tour, en 1748, la seigneurie de Magné à Emmanuel-François marquis de Lambertye, seigneur d'Usson, en Poitou. Le 21 décembre 1785, devant Duchatenier, notaire à Poitiers, Joseph-Emmanuel de Lambertye vend la terre et seigneurie de Magné à Jacques-Charles de Brouillac, moyennant la rente foncière de 2.000 livres, remboursable à 40,000 livres.
A la Révolution, Charles de Brouillac émigre, et le domaine de Magné est adjugé à divers acquéreurs, le 28 messidor an II (16 juillet 1794), en trente et un lots, pour un prix total de 302.260 francs.
Mais les Corgnol de Magné et de Fontenille n'étaient pas seuls de leur nom dans ce pays.
Nous en trouvons, en 1578, un à Tessé, paroisse de La Forêt-de-Tessé, un autre à Beauregard, paroisse d'Ebréon (1).
(1)
Ils plaident l'un contre l'autre. (Présidial, sentences, 3 mars). (Cette note, avec beaucoup d'autres, nous a été communiquée par M. de Fleury, archiviste de la Charente.)

Au XVIIe siècle, Charles Corgnol est en même temps seigneur de Tessé et de Beauregard. Son fils Philippe est aussi sieur de Tessé et Beauregard (2).
(2)
1647, 20 décembre, minutes de Gibaud.

Il en est de même de Louis, son fils, qui, d'ailleurs, fait sa demeure à Beauregard (3).
(3)
1702, 21 décembre, minutes de Blanchet.

Comme à Magné, le nom de Corgnol s'est éteint à Beauregard.
Mais un fils de Philippe Corgnol, Izaac, avait épousé, en 1656, demoiselle Marie de Lubersac, fille de Charles, sieur de Glanes, en la paroisse de Jauldes (4).
(4)
1656, 13 avril, présidial, insinuations, 1653-1659, folio 106, recto.

Il habite le lieu de Glanes et en prend le nom (5).
(5)
1673, 26 juin, minutes de D. Cladier.

Nous voyons, en 1673, Philippe, fils de cet Izaac, faire sa demeure au lieu noble des Touches, paroisse d'Anais (6), sans doute à la suite de son mariage avec Charlotte Martinaud.
(6)
Ibid.

En 1727, François Corgnol, écuyer, sieur de Granges, fils de Philippe, épouse demoiselle Marie Guy, fille de défunt Pierre Guy, procureur au présidial d'Angoumois, et c'est ainsi, semble-t-il, qu'il devient propriétaire du domaine, de Sillac, paroisse de Saint-Martin sous Angoulême (7).
(7) 1727, 11 juillet, minutes de Filhon.

Son fils Louis épouse Suzanne Pasquet, fille du seigneur de La Robinière, paroisse de Vilhonneur (8).
(8)
Archives départementales, fonds des familles. Les renseignements qui suivent sur les derniers représentants de la maison de Corgnol sont puisés dans ce fonds.

Il meurt laissant ses enfants encore mineurs, sans qu'aucun partage ait été fait des domaines de La Touche (ou Les Touches), de Fougère, paroisse de Saint-Angeau, ni de Sillac, paroisse de Saint-Martin.
Le fils de ce dernier, autre Louis, épouse, le 26 janvier 1764, Marie-Rose Grant de Luxolière de Bellussière, il achète, en 1776, le fief de Rochebertier, paroisse de Vilhonneur, dont il héritait pour partie du chef de sa grand-mère ; il est encore, en 1784 (28 juillet, minutes de Mallat.), à Sillac, avec ses soeurs; puis il va demeurer à Rochebertier, laissant Sillac à ses deux soeurs, Suzanne et Marie Corgnol.

Au moment où survient la Révolution, Louis Corgnol est mort; il a laissé, avec sa veuve, un fils, qui émigre, et cinq filles.
Les deux soeurs, à Sillac, la veuve et ses filles, à Rochebertier, tiennent tête à la Révolution. Comme représentant l'émigré, la nation vient en partage dans les domaines de Rochebertier, La Touche, Fougère ; les propriétaires sont constituées séquestres ; en l'an IX, elles en seront encore à solliciter un partage définitif qui mette fin aux mesures administratives, en même temps qu'aux «rapines du peuple voisin, enhardi par cette longue indivision».
Mais rien n'abat ces femmes énergiques, qui résistent pied à pied aux commissaires et experts venant faire les inventaires, récolements, estimations, vérifications des fruits perçus.
Nous relevons de curieux renseignements dans le procès-verbal de la séance où la veuve et quatre de ses filles se présentent devant l'administration municipale de Montbron, le 27 ventôse an VI, pour obtenir leurs certificats de non-émigration ; au bas de ces certificats doivent figurer leur âge avec leur signalement, notamment l'indication de leur taille :
Marie-Rose Grant, veuve Corgnol, âgée de cinquante-trois ans, taille d'environ cinq pieds ;
Suzanne Corgnol, épouse du citoyen Ruffray, âgée de vingt-cinq ans, taille cinq pieds ;
Madeleine Corgnol, âgée de vingt-quatre ans, taille cinq pieds un pouce ;
Marie Corgnol, âgée de vingt et un ans, taille cinq pieds ;
Suzanne-Élisabeth Corgnol, âgée de dix-sept ans, taille cinq pieds deux pouces.
Enfin, l'émigré revint, mais il ne lui naquit que des filles.


IV LES BIENS.
Revenons aux Corgnol de Magné.
On a vu que le domaine de Magné était assez étendu. Aux terres à blé se joignait un sol propre à la culture de la vigne, ce qui formait un ensemble avantageux.
Nous ne connaissons pas la valeur du domaine de Fontenille ; elle paraît avoir été assez importante. Le seigneur de Fontenille est un personnage, relativement aux possesseurs de fiefs qui l'entourent dans la même paroisse (1).
(1)
Il relève directement du comté de La Rochefoucauld. (Inventaire de 1667, cote pour l'année 1525.)

Les Tizon, seigneurs du Chêne-Vert, ne sont enterrés dans le chœur de l'église de Fontenille que «par grâce et emprunt» (1).
(1) Inventaire, an 1629. Pourtant le fief du Chêne-Vert, comme celui des Deffends, en la même paroisse, ont justice moyenne et basse, avec ressort à la juridiction de Châteauregnaud.

On doit ajouter encore à la seigneurie de Fontenille le fief de Bourbon.
De plus, le seigneur de Magné s'est rendu acquéreur du four banal de Courcôme.
Enfin, il a ses rentes ; mais il est difficile d'en connaître la valeur. Lorsqu'un acte de vente est rédigé, les parties se gardent, en général, de constater le montant de la rente et d'en opérer ainsi la reconnaissance sans y être contraintes. Dans les minutes des notaires, on rencontre ordinairement cette formule : «La pièce de terre de... tenue à rente de la seigneurie de... à certain devoir que les parties n'ont, quant à présent, pu déclarer».
Nous savons qu'il a fallu «onze feuillets de papier» pour contenir la nomenclature des rentes dues à la seigneurie de Fontenille ; mais cette pièce en onze feuillets ne nous est pas parvenue (2).
(2)
Elle est énoncée dans l'Inventaire de 1607, cote pour 1517. A cette occasion, voici un exemple d'arrentement fait, en 1684, à un laboureur à bras de la paroisse de Souvigné. «Alexandre de Beauchamps, écuyer, seigneur de Souvigné, demeurant en son château noble de Roissac, en Saintonge (paroisse de Crensac), étant de présent en sa maison noble de Souvigné : une pièce de terre en chaume et abandonnée il y a plusieurs années, contenant quatre boisselées, tenant d'un bout au chemin qu'on va d'Ébréon à Magné, etc. ; ... attendu que ledit seigneur de Souvigné a fait publier par trois divers dimanches, au prône de la grand'messe paroissiale dudit Souvigné, que tous ceux qui avaient des terres et vignes demeurées en chaume et en friche, tant à rente qu'à terrage, eussent à les faire valoir dans un mois ou autre délai compétent, autrement qu'il les donnerait à faire valoir à d'autres ;... baillé au droit de terrage et au septain des fruits, et, outre le susdit droit de terrage, sera prise la dîme connue sur les lieux circonvoisins». (27 décembre 1684, minutes de Forgent, notaire à Charmé.).

Il ne faut point, du reste, s'exagérer l'importance des revenus dont jouit le seigneur de Magné. Il ne possède pas le droit de justice ; il a dû reconnaître qu'il 'a aucune juridiction dans sa maison (Archives de la Vienne, G 795.) ; c'est à Courcôme que la justice est rendue par des chanoines délégués du chapitre de Saint-Hilaire (Ibid., G. 796.).
Si, comme seigneur de Fontenille, il est maître de ne laisser point enterrer dans l'église de ce lieu les petits possesseurs de fiefs qui l'avoisinent, à son tour il n'est, à Magné, qu'un petit possesseur de fief. C'est en vain que «damoizelle Catherine Corgnioux et Françoys de Beauchamps, son mari, segneur et dame de Magné, ont tenté de faire inhumer, le dernier avril 1559, dans la belle églize paroichialle appelée N.-D. de Courcosme, le corps de feu Louis Courgniou, quand vivoit seigneur de Magné» ; par sentence du 19 mai 1561, le «juge ordinaire du lieu, W Christophe Laguillie, licenssié ès droictz», a dit que les seigneurs de Magné n'ont pas droict de sépulture dans l'église de Courcôme (Ibid., ibid.).
Il doit même au chapitre de Saint-Hilaire 30 sols tournois «à toute muance de doyen et d'homme» (Voir la forme des aveux : par un procureur, par la veuve, par le seigneur lui-même. Appendice, A.).
Nous savons que la valeur vénale de «la terre et seigneurie de Magné» était, en 1785, de 2.000 livres de rente foncière ; c'est pour ce prix qu'elle fut vendue à messire de Brouillac. C'était exactement cette somme que rapportait annuellement la même seigneurie en 1632. Lorsque, à la mort de leur père, les mineurs tombent sous la tutelle de leur mère, la seigneurie se trouve affermée moyennant le prix de 2.000 livres; c'est ce chiffre annuel que Louis Fumée, écuyer, sieur de La Bazinière, deuxième mari d'Émerie de Moret, leur mère, porte en recette, en 1659, dans son compte de tutelle, pour le revenu de Magné. Dans ce même compte, le produit de la seigneurie de Fontenille figure pour 600 livres seulement (12-17 mai 1659, minutes de P. Filhon.).

Le revenu territorial de Magné et de Fontenille n'est donc que de 2.600 livres (il est vrai qu'il s'y ajoute, mais jusqu'en 1625 seulement, le domaine du Montet, estimé 22.000 livres).

Voyons maintenant comment vivait Henri Corgnol, le dernier de ce nom qui fut seigneur de Magné et Fontenille, mort le 4 mai 1667. C'est à Fontenille qu'il décéda ; il y avait transporté sou domicile quelques mois seulement auparavant, à raison d'arrangements de famille sur lesquels nous aurons occasion de revenir. Sa veuve fait faire inventaire par le notaire de Juillé.
A Fontenille, voici d'abord la chambre haute en laquelle ledit feu seigneur de Magné est décédé. On y trouve :
- un châlit de bois de noyer, lit, matelas, traversier de plume, garniture jaune, rideaux, bonne-grâce et tour de lit garni de frange, avec une couverte de laine blanche, le tout estimé 100 livres ;
- plus un autre châlit aussi de bois de noyer, avec garniture jaune à housses, 45 L. ;
- un cabinet de bois de popullon (peuplier), ferré et fermant à clé, 6 L. ;
- un coffre de bois de noyer ferré et fermant à clé, 10 L. ;
- un autre semblable, 8 L. ;
- trois fusils, 45 L. ;
- deux pistolets à fusil, 20 L. ;
- une épée avec sa poignée d'argent et une ceinture, 6 L. ;
- deux pistolets à rouet, 6 L. ;

- deux gros landiers, une crémaillère, 20 L. ;
- une méchante table de bois de chêne, 15 s. ;
A côté, une petite antichambre, il s'y trouve :
- un châlit de bois de noyer, 10 L.
- une méchante couchette du même bois, 20 s. Etc.
Autre chambre à côté :
- une table carrée avec son châssis de bois de noyer, avec un tapis de serge grise garni de frange, 4 L. 10 S. ;
- un châlit de bois de noyer, garniture de serge de Saint-Messant (Saint -Maixent), rouge, garnie de frange et frangeon soie de même couleur ;
- une couverte bordante de même serge, garnie de même frange et frangeon, avec quatre chaises et un tapis de même étoffe, garni de même frange et frangeon ;
- lit, matelas, trois couvertes blanches, estimé le tout, 180 L.
- autre châlit de bois de noyer, garniture de serge verte avec passement et frange ; deux couvertes de laine blanche, 70 L. ;
- deux coffres, 16 L.
- deux petites boites de cuir en moquette rouge, garnies de clous ferrés et fermant à clé, 6 L.
- deux landiers de cuivre, 20 L.
- douze chaises garnies de moquette, 24 L.
- un fauteuil avec sa garniture de serge rouge, 40 S.
Salle basse dudit logis :
- une table ronde sur son châssis, 40 S.
- quinze chaises de bois de noyer sans garniture, 4 L. 5 S.
- trois méchantes chaises de paille, 2 bancs et 3 grands tabourets de bois de noyer, 6 L. ;
- un grand vieux coffre à l'antique,4 L. ;
- autre méchant coffre, 30 S. ;
- une grande vieille chaise à l'antique de bois de chêne, 12 S. ;
L'ouverture des coffres dans les chambres donne les objets suivants :
- quatre-vingt-huit livres d'étain étant en plats et assiettes, estimés 15 sols la livre, 60 L. ;
- deux ovales d'étain, deux aiguières, dont une est couverte, deux cuillères, deux écuelles, un vinaigrier, une salière et deux flambeaux, le tout d'étain, 25 L. ;
- quatre assiettes d'étain avec une pinte, une chopine, un tinart, un gobelet, le tout d'étain, 5 L. ;
- un petit étui dans lequel s'est trouvé douze cuillères et douze fourchettes d'argent et une salière  d'argent, estimé le tout à neuf vingt livres, 180 L. ;
- plus du linge...
- plus deux garnitures de deux chambres de tapisserie de belle gaîne, estimées à 100 L. ;
- deux tapis de serge grise avec leur frange, 30 L. ;
- une garniture d'un lit de serge verte avec sa frange, 15 L. ;
- une autre de boulangeat vert, 10 L. ;
- douze garnitures de chaises au gros point, 48 L. ;
- un miroir dont le cadran est d'écaille tortue, 10 L. ;
Dans les écuries dudit logis, ou trouve :
- deux boeufs d'aras, garnis de joug et juille, avec le versoir et soc, estimé le tout, 140 L. ;

- une jument grise avec ses harnais de selle et bride, 250 L. ;
- autre jument de poil bai avec sa selle et bride, 120 L. ;
- un cheval bai soreau (aux oreilles courtes) avec ses harnais, 100 L. ;
- trente-huit chefs de brebis, 45 L. ;
- trois chèvres, 10 L. ;
- vingt chefs d'agneaux, 20 L. ;
Plus des treuils, mets à faire vin, barriques, etc.

A Magné, il est resté quelques meubles : un buffet de bois de chêne, des coffres, charniers, etc. On y trouve surtout des cheptels de veaux et brebis, des treuils et tonneaux pour la fabrication du vin. Et enfin un carrosse avec quatre harnais de chevaux, estimé le tout 80. Ce carrosse suffit à montrer que le goût du luxe avait pénétré jusqu'à Magné. L'alliance d'Henri Corgnol avec Marguerite Normand ne laissait pas d'être avantageuse. La jeune femme avait apporté de la riche maison dont elle sortait, outre sa dot, qui était, ainsi que nous aurons occasion de le montrer, de 14.000 livres, nombre d'objets mobiliers ; nous ne parlerons pas d'un lit, matelas et couvertes, ni du cabinet de populon trouvés dans la chambre du défunt, ni de dix-huit brebis et une chèvre comprises dans le cheptel de Fontenille et de deux vaches comprises dans celui de Magné ; mais nous noterons l'une des deux garnitures de chambres de tapisserie de belle game, les douze garnitures de chaises au gros point, le miroir d'écaille et six cuillères d'argent, outre le fauteuil garni de serge rouge. Si le jeune ménage s'est contenté de douze chaises garnies de moquette, c'est qu'évidemment des difficultés trop peu prévues ont arrêté son essor. Nous verrons quelle fut la source de sa gêne. Il faut remarquer ici que le mobilier des autres branches de la famille est demeuré fort modeste : point de sièges en tapisserie, encore moins de carrosse, soit à Sillac, soit à La Touche, soit à Rochebertier.

A Sillac, quand les délégués de l'administration du district viennent faire inventaire et apposer les scellés, «étant entrés dans une petite salle ouvrant sur la cour, ils trouvent un vieux buffet fait de bois de noyer, onze chaises, dont six en bois de cerisier, un fauteuil, le tout garni de jonc».
Au-dessus de la salle à manger, voici l'ameublement de la principale chambre «bois de lit à la duchesse, le devant en siamoise moirée, les rideaux de vieille étoffe verte», etc. ; puis la cuisine, et c'est tout.

A La Touche, «au rez-de-chaussée, une table, de mauvaises chaises, des lits», et ainsi de suite.

A Rochebertier, c'est un vrai «château» où l'on entre. Qu'y trouve-t-on ?
Dans «l'appartement appelé salon, qui a vue sur le jardin :
- deux tables et un pliant qui sert à les supporter toutes deux, et 7 chaises garnies de jonc ;
- un mauvais buffet sur lequel il s'est trouvé six bouteilles de verre, douze gobelets, deux carafes et deux pots à eau, le tout estimé, y compris le buffet, 6 livres ; ouverture duquel ayant été faite, il s'y est trouvé quatre douzaines d'assiettes, une douzaine de plats de faïence de différentes façons, cuillères d'étain, fourchettes de fer ;
Autre salon qui a également vue sur le jardin :
- mauvaise table «à cadril» et dix-sept chaises garnies de jonc ;
Chambre haute qui prend jour sur la cour et sur le jardin :
- une table «à cadril»,
six chaises garnies de jonc, deux lits à la duchesse anciens, avec rideaux d'indienne, et ainsi de suite (1).
Dans l'écurie, outre quatre boeufs, cochons et brebis, deux vieux chevaux, l'un blanc et l'autre bai, estimés, avec une selle, leurs brides et licols, le tout 60 L. Voilà l'équipage de l'ancien seigneur de Rochebertier.

(1) «Aux XVIIe et XVIIIe siècles, le luxe dans l'ameublement ne distinguait point, d'ordinaire, la demeure seigneuriale de la maison du bourgeois. De nombreux inventaires de mobiliers, ceux des châteaux de Balzac, de La Bréchenie, de La Chétardie, par exemple, ne donneraient que des déceptions aux amateurs qui y chercheraient des meubles dont la richesse fût en rapport avec la situation des propriétaires.» (Observation présentée par M. de Fleury à la séance du 11 avril 1888.)

V LA TRANSMISSION DU DOMAINE.
Pour pénétrer tout à fait dans l'intimité de la maison dont nous connaissons les alliances, l'habitation et les biens, il est nécessaire d'assister aux partages et règlements de famille. Nous savons qu'au commencement du XVIIe siècle, la demoiselle d'Alloue était restée veuve d'Isaac Corgnol avec deux enfants : un fils, Philippe, et une fille, Florence. qui épousa Étienne de Barbezières, sieur de Montigné, demeurant au lieu noble de Villesion, paroisse de Nanclars.


Un partage cumulatif, tant des biens du père que de ceux de la mère survivante, avec le concours de celle-ci, intervint.
Ces biens se composaient des seigneuries de Magné, Fontenille et le Montet. Nous savons que les deux premières étaient estimées à 2.000 livres et 600 livres de rente foncière, soit, en capital, 40.000 livres et 12.000 livres ; la terre du Montet fut prisée à 22.000 livres. Les terres et seigneuries de Magné et Fontenille échurent à Philippe, et à Florence, la terre et seigneurie du Montet, à la charge de payer à son frère la somme de 2.000 livres pour supplément de partage ; en outre, Philippe se réservait «le droit de retirer la terre du Montet dans deux ans en payant à ladite Florence la somme de 20.000 livres.
Mais les dettes annoncées par la «demoiselle d'Alloue et dont elle "baille" un extrait, sont de 15.340 livres ; en réalité, il se trouvera qu'elles s'élèvent à la somme de 19.882 livres ; elles sont dues, notamment, à Pierre Rambaud, fermier de Fontenille, à Jacques Rambaud, sieur de La Croix, au sieur de Bessé et à plusieurs marchands d'Angoulême et de Poitiers. De plus, la demoiselle d'Alloue avait perçu d'avance du fermier du Montet le prix de deux années ; enfin, pour son douaire, celle-ci retenait la jouissance de la seigneurie de Fontenille. De là, nécessité de remanier le partage ; on en est réduit à laisser vendre sur saisie la terre du Montet, finalement la dame de Montigné reçoit à peine 10.000 livres.
Quel que fût le poids des dettes dont elle dut prendre moitié à sa charge, on serait surpris de voir la sœur du seigneur de Magné se contenter de cette faible part du patrimoine commun. Si l'on ne savait qu'un prélèvement avait dû être fait au profit du frère à titre de droit d'aînesse.
Nous devons dire ici un mot du droit d'ainesse : il s'exerce «entre nobles, en noble et directe succession»,
au profit du «fils aîné ou fille aînée des succédants quand il n'y a hoir mâle ou qui le représente», et comprend : 1. «le châtel ou principal manoir de la succession avec ses anciennes préclôtures, la fuie, garenne, four et moulin à ban, pourvu toutefois qu'ils ne soient séparés par chemin charruau et public et rivière navigable ou autre ancienne séparation dudit châtel et manoir principal et préclôture d'icelui » ; 2. «et, en outre, sur autres cohéritiers, le quint de la succession par préciput et avantage» (1).
(1)
Coutume de Saint-Jean-d'Angély, art. XXXIX, et Coutume d'Angoumois, art. LXXXVIII et LXXXIX.

Au reste, Philippe Corgnol ne se trouva en possession que de la seule seigneurie de Magné (sa mère jouissant de Fontenille), et partie de la dot de sa femme fut employée à acquitter sa part de dettes.
Il eut quatre enfants : un fils, Henri Corgnol, et trois filles, dont une décéda en 1650.
Il mourut en 1632, laissant, à son tour, une succession embarrassée ; il avait dû emprunter du sieur Chaléroux, fermier de Magné, une somme de 6,000 livres, remboursable par annuités de 1,200 livres pendant cinq ans.
Sa veuve, Émerie de Moret, se remaria en 1634 avec Louis Fumée, écuyer, sieur de La Bazinière, qui devint tuteur des enfants du premier lit.
Le compte de tutelle, réglé en 1659, à la suite d'actes nombreux de procédures commencées à Saint-Jean-d'Angély et à Bordeaux, aboutit à ce résultat qu'Henri Corgnol conserva Magné et Fontenille en renonçant à tous droits dans la succession d'Émerie de Moret (2).
(2)
16 janvier 1634, minutes de Martin, et 8 août 1658, minutes de Mottrou ; 21 février 1655, 15 septembre et 8 août 1658, minutes de Mourou ; 7 mai et 12 mai 1659, minutes de P. Filhou.

Mais il dut acquitter avec la dot de sa femme divers capitaux, y compris la dot de sa sœur, mariée à Louis de Barbezières, sieur de Villesion, son cousin (1).
(1) 7 février 1651, minutes de Guyot.

Il resta encore devoir celle de son autre soeur, mariée au sieur du Breuil-Bernae, soit 7,000 livres. Il devait bien d'autres sommes, toutes exigibles ; le total de celles dues «aux premiers et plus anciens créanciers» s'éleva à 21.651 livres (2).
(2)
24 janvier 1667, minutes de Mouron.

En 1666, il rencontra une alliance brillante pour sa fille aînée dans le fils ainé du seigneur du Vivier d'Aulnac, qui habitait le château de Ruffec, Henry de Volluyre, seigneur de Touchabran (3).
(3)
Dans le contrat de mariage d'Émerie avec le fils du seigneur du Vivier d'Aulnac, «les sieur et dame de Magné déclarèrent marier leur fille comme leur aimée, seule et principale héritière en tous leurs biens présents et futurs, à condition de bailler et payer à damoiselle Magdeleine Corgnol, leur seconde fille, la somme de 10.000 livres, ils se réservaient la faculté de disposer de 6,000 livres. Les époux devaient faire leur demeure dans la maison des seigneur et dame du Vivier d'Aulnac, qui instituaient également leur fils connue leur seul et principal héritier en tous leurs biens présents et futurs, à condition de bailler et payer à ses frères et soeurs puisnées à marier la somme de 10,000 livres chacun», se réservant, en outre, la faculté de disposer personnellement d'autre somme de 10,000 livres.

Les sieur et dame de Magné délaissaient aux jeunes époux, en attendant leur future succession, la seigneurie de Fontenille et le fief de Bourbon. Il n'était pas question des dettes. Mais Fontenille et Bourbon ne tardèrent pas à être saisis. Et dés le 24 janvier de l'année suivante, «par voie de transaction, les sieur et dame de Magné durent délaisser la seigneurie dudit Magne, avec ses circonstances et dépendances, sans en rien réserver, y compris le four banal situé au lieu de Courcôme,... ladite seigneurie faisant la meilleure part et la plus considérable de leurs biens» se réservant seulement les seigneuries de Fontenille et Bourbon, délaissées en dot à ladite dame de Barbezières, sieur de Villesion, son cousin (1).
(1)
7 février 1651, minutes de Guyot.

Il resta encore devoir celle de son autre soeur, mariée au sieur du Breuil-Bernac, soit 7,000 livres. Il devait bien d'autres sommes, toutes exigibles ; le total de celles dues «aux premiers et plus anciens créanciers» s'éleva à 21,651livres (2).
(2)
24 janvier 1667, minutes de Mouron.

En 1666, il rencontra une alliance brillante pour sa fille aînée dans le fils ainé du seigneur du Vivier d'Anlnac, qui habitait le château de Ruffec, Henry de Volluyre, seigneur de Touchabran (3).
(3)
Dans le contrat de mariage d'Émerie avec le fils du seigneur du Vivier d'Aulnac, «les sieur et dame de Magné déclarèrent marier leur fille comme leur ainée, seule et principale héritière, en tous leurs biens présents et futurs, à condition de bailler et. payer à damoiselle Magdeleine Corgnol, leur seconde fille, la somme de 10,000 livres ; ils se réservaient la faculté de disposer de 6,000 livres. Les époux devaient faire leur demeure dans la maison des seigneur et dame du Vivier d'Aulnac, qui instituaient également leur fils connue leur seul et principal héritier en tous leurs biens présents et futurs, à condition de bailler et payer à ses frères et soeurs puisnées à marier la somme de 10,000 livres chacun, se réservant, en outre, la faculté de disposer personnellement d'autre somme de 10,000 livres.

Les sieur et dame de Magné délaissaient aux jeunes époux, en attendant leur future succession, la seigneurie de Fontenille et le fief de Bourbon. Il n'était pas question des dettes. Mais Fontenille et Bourbon ne tardèrent pas à être saisis. Et dés le 24 janvier de l'année suivante, par voie de transaction, «les sieur et dame de Magné durent délaisser la seigneurie dudit Magné, avec ses circonstances et dépendances, sans en rien réserver, y compris le four banal situé au lieu de Courcôme, ladite seigneurie faisant la meilleure part et la plus considérable de leurs biens, se réservant seulement les seigneuries de Fontenille et Bourbon, délaissées en dot à ladite dame de Touchabran, pour la subsistance desdits seigneur et dame de Magné... Et parce que, par le moyen de ladite constitution ainsy exécutée et prématurée en faveur de ladite dame de Touchabran, elle se tienne sujette au payement des dettes de ses sieur et dame ses père et mère, il a été convenu que lesdits sieur et dame de Touchabran en payeront dés à présent d'ores en avant jusqu'à la somme de 21,656 livres aux premiers et plus anciens créanciers desdits sieur et dame de Magné, particulièrement à ceux qui ont fait saisir lesdites seigneuries de Fontenille et Bourbon, iceux rendront taisants, afin que la possession en demeure paisible auxdits sieur et dame de Magné, au payement de laquelle somme Mre Jean de Volluire, chevalier, seigneur du Vivier d'Aulnac, et dame Marie du Bois, son épouze, demeurants audit château de Ruffecq, se sont volontairement obligés et leurs biens solidairement avec lesdits seigneur et dame de Touchabran, leurs fils et nore».
Henri Corgnol meurt à Fontenille le 4 mai suivant, âgé seulement de quarante-deux ans. Et, en 1675, une transaction définitive intervient entre la veuve et ses deux filles, dont la seconde vient d'épouser Anthoine Dusouchet, écuyer, seigneur de Villars, en la paroisse de Garat. Il est dit que la veuve d'Henri Corgnol reviendra à Magné, «mais jusqu'à ce que ledit seigneur du Vivier l'ait donné à ferme, auquel temps elle sera tenue de vuider» (1).
(1)
«Contre l'acceptation d'institution d'héritier et promesse de payer pour ladite dame de Villars la somme de 10,000 livres, les seigneur et dame du Vivier auront obtenu lettres de rescision fondées sur minorité et sur les grandes charges de l'institution paternelle, disant vouloir estre receus se dire héritiers bénéficiaires du père, prendre et lever les précipuds et droits d'aisnesse, et. partager le reste avec ladite dame de Villars, en suportant les debtes par moityé. Et à l'esgard des droits maternels, lesdits seigneur et dame du Vivier demandoient à ladite dame de Magné l'effet de la constitution dottale pour une moityé, c'est-à-dire le remploy d'une moityé de la terre de Fontenille qui a esté vendue pour acquitter partye des debtes de la Maison ; et encore vouloient que ladite dame leur rendit compte.» La dame de Magné se démet de tous ses biens et droits ; elle se réserve la jouissance du fief de Bourbon pendant sa vie, sauf la faculté pour le sieur du Vivier de vendre ce fief, moyennant le remplacement quant au revenu, et la somme de 280 livres de revenu annuel sur la terre de Magné, payable par le fermier que le sieur du Vivier y mettra. La légitime de la dame de Villars est réduite à 8,000 livres franches et quittes de dettes et charges, moyennant quoi elle renonce à tous droits et prétentions sur les biens paternels et maternels présents et futurs. (18 novembre 1675, ) minutes de G. Jelieu.)

Ainsi, la veuve d'Henri Corgnol sera à nouveau bannie de Magné, comme elle l'avait été une première fois en 1667 avec son mari, qui mourut trois mois plus tard, peut-être de douleur et d'humiliation.
Désormais, c'est un fermier qui résidera seul au siège de la seigneurie ; cependant cette terre ira de main en main, servant à doter les filles des maisons de Ruffec et de Bessé, jusqu'à ce qu'elle passe à un acheteur de la province voisine.
Quelles furent les vraies causes de cette déchéance et de cet abandon ?
L'aride exposé qui précède ne peut offrir d'intérêt qu'au point de vue de la solution à donner à cette question.
Les causes immédiates sont multiples d'abord des dettes relativement considérables, puis des minorités successives, enfin l'absence d'un héritier mâle.
Ces difficultés étaient-elles insurmontables ?
Nous n'avons pas à critiquer ici, rétrospectivement, les comptes de ménage des seigneurs de Magné; nous ne voulons pas revenir sur le luxe introduit dans sa maison par Henri Corgnol et lui reprocher le tort qu'il eut de voyager en carrosse par les mauvais chemins que l'on voit aujourd'hui encore autour de son logis (1).
(1)
En Poitou, «les femmes voyageaient à cheval ou dans des voitures à boeufs». (Mémoires de la marquise de La Rochejaquelein, chap. V.)

Pourtant, il faut remarquer ici combien l'esprit de prévoyance est et fut toujours nécessaire à toutes les classes sociales. Constatons deux faits : d'une part, Isaac et Philippe, morts prématurément, il est vrai, comme Henri lui-même, n'ont point songé à régler d'avance leur succession par testament ; de l'autre, Henri rechercha pour sa fille aînée l'alliance brillante d'un aîné de la maison de Volluyre qui devait emmener sa femme au château de Ruffec, alors que quelque cadet d'une famille prospère, pourvu d'une dot en écus, fût venu continuer la maison de Magné, comme fit en 1409 Aubert Corgnol en épousant Catherine Merle.
Il est même évident que Magné eût passé en des mains étrangères dés avant 1625, si la coutume légale n'y eût pourvu. C'est le droit d'aînesse qui a maintenu debout la maison de Magné au moins pendant le XVIIe siècle.
Au milieu de quelles difficultés et pour aboutir à quel résultat, nous le savons. Le droit d'aînesse, création de la loi aussi naturelle, sous le régime féodal, que peuvent l'être sous le régime monarchique l'hérédité du trône et l'inaliénabilité des biens de la couronne, n'était donc point lui-même d'une efficacité absolue dans le groupe social où il s'exerçait. Il existe, en effet, quelque chose qui vaut mieux que cette loi aveugle c'est, à la faveur de la liberté testamentaire, la Prévoyance du chef de famille qui mit un héritier soit de l'aîné, soit du plus jeune ou d'un cadet, c'est-à-dire de celui de ses enfants qui réunit le mieux les vertus nécessaires pour s'associer au père, travailler et économiser avec lui à l'effet de conserver intact le foyer domestique, établir ses frères et sœurs suivant leurs aptitudes, les recevoir à ce foyer où ils ne seront jamais des étrangers, recueillir même tout à fait ceux à qui la force ou la prévoyance feraient défaut. Voici quelle est, en effet, la coutume des peuples libres et prospères de l'Occident :
«Les parents associent à leur autorité celui de leurs enfants adultes qu'ils jugent le plus apte à pratiquer de concert avec eux, puis à continuer après leur mort l'oeuvre de la famille. Pour le retenir près d'eux et pour lui faire accepter une vie de dépendance et de devoir, ils l'instituent, à l'époque de son mariage, héritier du foyer et de l'atelier. Ils placent, d'ailleurs, au premier rang des devoirs imposés à leur associé, l'obligation d'élever les plus jeunes enfants, de leur donner une éducation en rapport avec la condition de la famille, enfin de les doter et de les établir selon leurs goûts, en les dispensant de tout devoir positif envers la maison souche.» (1).
(1)
Le Play, l'Organisation, de la famille, 3e édition, pages 20 et 30.

Henri Corgnol eut sous les yeux l'exemple de cette pratique des «familles souches» chez les Normand où il prit sa femme.
En 1649, les époux Normand père et mère font leur testament ; ils instituent leur fils «héritier universel», à la charge par lui d'assurer à chacune de ses quatre soeurs les dots dont le chiffre est déterminé, et à la condition par celle-ci de renoncer à la succession.
«L'héritier» est si bien, dès lors, «l'associé» du chef de famille, qu'il intervient, à côté de son père, au contrat de mariage de Françoise Normand et d'Henri Corgnol, en 1651 : père et fils promettent de payer la dot, et, à cet effet, ils «obligent et hypothèquent tous leurs biens présents et futurs solidairement l'un pour l'autre» (1).
(1)
Voir appendice, C.

Henri Corgnol institua, il est vrai, sa fille aînée «héritière universelle», avec la charge de doter sa fille plus jeune ; mais l'héritière devait-elle habiter le foyer de sou père? Nullement ; elle reçut, au contraire, en avancement d'hoirie Fontenille et Bourbon : l'institution d'héritier ainsi comprise n'a plus d'autre signification que de créer un avantage arbitraire au profit d'un des enfants.

VI.
LES SUITES DE L'EXTINCTION DE LA MAISON DE MAGNE.
Nous venons de voir qu'Henri Corgnol, le dernier de son nom à Magné, n'avait pas su, par l'association d'un gendre à l'administration de sa seigneurie, y perpétuer sa famille. Le gouvernement révolutionnaire, en prononçant l'adjudication du domaine de Magné en trente et un lots, ne fit que consommer un fait déjà acquis et rendre presque irréparable l'abandon de ce domaine (2).
(2)
Voir appendice, B.

La Révolution n'a point, comme on le croit souvent, produit la désorganisation des domaines; elle-même n'est pas une cause, mais un résultat. En effet, autour de Magné, nous voyons pareil spectacle. Les maisons seigneuriales de Souvigné, de Beauregard et de Champlambeau, paroisse d'Ébréon, ont été abandonnées dans le second quart de ce siècle par les familles nobles qui n'avaient pas cessé d'en jouir ; même sort pour Fontenille, Villesion, Le Breuil-Bernac. Et en même temps, nous le savons, disparaissaient aussi les familles bourgeoises, pourtant si nombreuses, notamment à Tusson.
C'est là un seul et même ordre de faits, ayant une cause unique, celle que nous avons étudiée à Magné : la désorganisation du foyer domestique.
Cette dissolution des anciens domaines, et l'extinction, ou du moins l'éloignement au profit de la ville des anciennes familles nobles et bourgeoises, est-elle un bien?
On sait que ni la petite propriété, ni même le morcellement ne sont le propre de notre temps ; nous l'avons surabondamment démontré dans notre monographie de Tusson. A Magné, le logis des Corgnol est, il est vrai, partagé aujourd'hui entre trois propriétaires différents ; mais chacun d'eux possède et dirige personnellement un autre domaine distinct de ceux-ci, dont l'exploitation est confiée à des métayers.
Peut-être l'indépendance individuelle et l'indépendance communale ont-elles bénéficié de cette double dissolution des familles anciennes et des domaines traditionnels ?
Tout d'abord, il est entendu qu'il n'est pas question de privilèges seigneuriaux, mais exclusivement d'influence morale.

En ce qui concerne l'indépendance individuelle, les paysans, isolés de tout appui et de tout conseil désintéressés, se trouvent livrés à l'autorité exclusive des bureaucrates et des gens de loi.
En ce qui concerne l'indépendance communale, nous continuons à nous contenter de cette somme de liberté que l'on a vue appartenir, au XVIIIe siècle, aux «communautés d'habitants» : droit de nommer le syndic, droit de faire les réparations nécessaires aux édifices, pourvu que Mgr l'intendant veuille bien y donner son autorisation ; pour le surplus, obéissance passive aux ordonnances de Mgr l'intendant. C'est, en un mot, le régime césarien étendu jusqu'à l'administration locale, domaine propre de la démocratie.
Tous ces maux, redisons-le, puisque c'est la vérité, ne sont pas l'oeuvre de la Révolution ; ils datent d'un peu plus de deux siècles ; mais ils ont été s'envenimant, et la législation moderne les a rendus inguérissables par cet ensemble de dispositions sur les pactes relatifs aux successions futures, sur la quotité disponible et les liquidations judiciaires, qui, aggravés par une jurisprudence aveugle, constituent cet ensemble meurtrier qu'on désigne sous le nom de partage forcé.
Il n'est guère de familles qui puissent y résister, du moins parmi celles qui possèdent la moyenne et la petite propriété ; or, l'unité sociale, ce n'est ni l'individu ni l'État, mais la famille.
Une réforme de la loi au profit d'une sage liberté du père de famille dans la répartition de ses biens est donc nécessaire. Mais notre étude démontre que cette réforme légale ne saurait suffire, puisque même une loi de contrainte en sens opposé, celle relative au droit d'aînesse, n'a pu empêcher le mal de se produire.
La réforme indispensable est celle des idées et des moeurs dans le sens de la stabilité du foyer, de la transmission intégrale de l'atelier domestique, en un mot, de la reconstitution de la famille.


APPENDICES

A.
Du 12 juin 1606 (Archives de la Vienne, G. 800)
Aveu fait par Me Vaurigaud, procureur au siège présidial de Poitiers, procureur constitué pour faire l'hommage de la seigneurie de Magné, reconnaissant au nom de son mandant devoir : pour l'un desdits hommages liges, 10 sols tournois, et pour l'autre, 20 s. t., à toute muance (mouvance) de doyen et d'homme : lequel dit Vaurigaud, pour cette fois seulement, sans tirer en conséquence, fait le serment requis sur les Saints Évangiles entre les mains du doyen.

Du 22 octobre 1613 (ibid., G. 803)
Aveu par Renée Daloue, veuve d'Izaac Corgnou (Corgnol) : Nous, les doyen, chanoynes et chapitre l'esglize insigne séculière et collégiale Saint Hilayre le Grand de ceste ville de Poictiers... (Damoiselle) Renée D'alloue nous a requis estre receue à fayre les foy et hommage liges, tant pour elle que pour ledit Philippes Corgnou, son fils aysné et aultres ses enffans et dud. feu, et leurs comparsonniers, à nous d'heu à mutation de doyen et d'homme vassal, au debvoir de dix sols t. de monnoie courante d'une part, et 20 sols t. d'autre, aussi de monnoie courante d'achaptement ou debvoir, à cause dud. lieu de Magné; et nous a offert de paier les mutations...
Desquels hommages liges pour led. lieu, nous avons receu lad. damoiselle Renée Dallouhe veufve, tant pour elle, etc...
Et laquelle veufve estant à genoux nous en a faict et à lad. esglize le sermant de fidélité en tel cas requis sur les saints Évangilles, entre les mains de vénérable et discrette personne Mre Philippes Cacaud, doyen...

Du 7 avril 1623 (Archives de la Vienne, G. 804)
Sachent tous que Je Phelippes de Courgnol, escuyer, sieur de Magné, demeurant au lieu noble de Magné, paroisse de Courcosme, estant de présent en ceste ville de Poictiers, ay teneu et moy advouhe tenir oud. nom à cause de lad. seigneurie de Magné de Mre le doyen et chappitre de l'Églize Saint Hillayre le Grand de Poictiers, à cause de leur maison, seigneurie et chastellanye de Courcosme en Sainctonge, à foy et hommage lige à 30 solz de debvoir, muanse de seigneur et d'homme, les choses qui s'ensuyvent :
Premièremant, l'hostel et hebergemant dud... Magné assiz en la paroisse dud. Coureosme, ensemblement avecq ses entrées et issues, jardins, fuyes et garennes, etc.


B.
Du 7 mars 1666 (Mourou, notaire à Juillé)
MARIAGE de Monsieur de Touchabran et damoiselle Esmerie de Corgnol, son espouze. Mre Henry de Volluire, chevalier, seigneur de Touchabran, fils de Mre Jean de Volluire, chevalier, seigneur du Vivier d'Aulnac, et de dame Marie du Bois, son espouze (Touchabran provenait de Marie du Bois), demeurant au chasteau de Ruffecq en Angoulmois, d'une part ;
Et damoiselle Esmerye Corgnol, fille naturelle et légitime de Mre Henry de Corgnol, chevalier, seigneur de Maigné, et dame Marguerite Normand, demeurant au chasteau de Maigné, paroisse de Courcosme en Xaintonge, d'autre part ;

Lesd. seigr et dame du Vivier (d'Aunac) ont déclaré marier le sieur de Touchabran, leur fils comme leur seul et principal héritier en tous leurs biens présents et futurs, à condition de bailler et payer à ses frères et soeurs puisnés à marier la somme de 10,000 livres chascun pour tous leurs droitz et légitimes en leurs futures successions, et en outre se sont réservés la faculté et le pouvoir de dispozer en la faveur de telles personnes que bon leur semblera de la somme de 10.000 livres.
Et au regard desdits sieur et dame de Maigné, ils ont pareillement déclaré marier ladite damoiselle Esmerie Corgnol, leur fille, comme leur aisnée, seule et principale héritière en tous leurs biens présents et futurs, à condition de bailler et payer à damoiselle Maigdelaine Corgnol, leur seconde fille, la somme de 10,000 livres aussy pour tous ses droitz en leurs successions à venir, et en outre se sont réservés la liberté de pouvoir disposer de la somme de 6.000 livres en la faveur de telles personnes que bon leur semblera ; et en cas que lesdits enfants puisnés de l'une et de l'autre part voulussent impugner le règlemant de leur légitime, lesd. seigr et dame du Vivier, d'une part, et lesd. seigr et dame de Maigné, d'autre, ont donné et donnent par ces présentes ausd. parlés à marier leurs enfants chescun en droit soi leurs meubles et acquets et le tiers des propres suivant les coutumes des lieux où leurs biens sont situés par préciput et hors part
...
Convenu et décidé que lad. parlée à marier yra faire sa demeure en la compoignée dud. seigr de Touchabran, dans la maison desd. seigr et dame du Vivier d'Aulnac, en laq. lesd. parlés à marier seront nourris, eux, leurs enfants, vallets, servantes, chevaux et autres équipages, durant le temps qu'ils y demeureront, et, en outre, lesd. seigr et dame du Vivier leur bailleront annuellement par demy année et à l'avarice la somme de 1.000 livres pour s'entretenir dabitz, eux et leurs trains, payer leurs sallaires de leurs vallets et servantes et l'entretenement de leurs chevaux. Et lesd. seigr et dame de Maigné, en attendant leur future succession, ont dès à présent délaissé et délaissent à lad. proparlée à marier, leur fille, la seigneurie de Fontenille et le fief de Bourbon avec touttes leurs circonstances et dépendances, sans aucune exception ni réserve, pour en jouir en la St Jean Baptiste. prochaine, franchement et quittement de toutes sortes de debtes et charges, avecq sa garniture d'une chambre de meubles convenables suivant la qualité des parties, de toutes lesq. choses lesd. seigr et dame du Vivier jouiront durant le temps que lesd. parlés à marier demeurent avecq eux.
Et en cas de séparation desd. parlés à marier d'avecq lesd. seigr et dame du Vivier, lesd. seigneur et dame leur en laisseront la jouissance et en oultre donneront à leur fils aisné, en advancement de leur succession, la somme de 300 livres annuellement, payable par demie année et à l'avance, et en oultre des meubles raisonnables pour meubler leur maison ou la somme de 1.500 livres une fois payée. Contracteront les proparlés à marier communauté de tous meubles et acquetz, suivant la coutume de cette province d'Angoulmois, à laq. laditte proparlée à marier pourra ce tenir ou renoncer, et ses héritiers en ligne directe ou collatéralle auront la mesme liberté ; et en cas d'acceptation, ladite communauté sera partagée par moitié, sur laq. néantmoingtz led. parlé à marier, en cas de survivance, prandra au préalable ses armes, chevaux et équipages, et en cas de prédécedz, lad, parlée à marier, survivante, prendra aussi par préalable ses bages, joyaux, meubles et vestementz et équipages nécessaires à sa personne, et en cas de renonciation, lad. parlée à marier ou ses héritiers reprendront tout ce qu'elle aura apporté et lui sera obvenu durant led. mariage par succession, donation ou aultement, franchement et quittemant de toutes debtes, dont l'indemnité prendra du jour de ces présentes, et aura lad, parlée à marier son douaire suivant la coutume où les biens dud. parlé à marier sont situés, logés et hébergés, avec une chambre garnie, et en oultre lesd. parlés à in. se sont donnés réciproquement, par forme de guin de nopces et agencement, la somme de 1.500 livres, la propriété (revenant) aux enfants dud. mariage si aucuns sont.

Fait et passé dans un pré appelé le pré de la Brouhe, en la paroisse de Raix en Angoulmois, destroit dud. notaire, avant midy, le 7e jour du mois de mars 1666, en présence d'Yzaac Pelletier, sr de Grandmaison, demeurant aud. Courcosme, et Jean Vallin, sieur de Fonguion, maitre apothicaire, demeurant en la ville de Ruffecq, tesmoins requis et appeliez...
Signé:
Henry DE VOLLUIRE.
Émerie CORNIOL.
Jehan DE VOLLUIRE.
Marie Du BOIS.
Jehan DE LIVENE.
Aymery DE VOLLUYRE.
Raymon D'ABZAC.
Renée DE VOLLUYRE.
M. NORMAND.
F. NORMAND.
Louis DE LIVENNE.
Jean DESPREZ.
René JAY.
Marie DE VOLLUYRE.
NORMAND.
Suzane CORNIOL.
Jaquet MARTIN.
Charlotte DE MARTEZ.
M. PREVERAUD.
Jean-François DE VOLLUYRE.
Louis DE LIVENE.
F. NORMAND.
Raymond JAY.
DE MORET.
Charles DUMAS.
Louis DAUTECLERE.
F. BLONDEAU.
J. AMPERNAUD DE CHASTEAUROY.
E. INGRAND.
Henry CORGNOL.
NORMAND.
Henry JAY.
NIEUIL
Philippe CORGNOL.
Jean CORGNOL.
F. MARTIN.
François AVRIL.
Charles DUROUSSEAU.
BOUYER, prêtre, curé de Courcosme.
G. RULLIER, prêtre, curé de Chazelles.
J. VALLIN, RAMDAUD, PELLETIER.
MOUROU, notaire royal.


C.
Du 3 décembre 1649 (Guyot, notaire à Angoulême)
TESTAMENT de... François Normand, escuyer, sr de Puygrelier, conseiller du roy au siège présidial d'Angoumois, et damoiselle Maire Aigron, nostre éspouse, saine d'esprit et entendemant, niais indisposée de son corps...

… nous avons fait nostre présant testament en la forme et manière qui s'en suit : inhumation èspulture des prédécesseurs de mon dit Sr de Puygrelier qui sont dans l'esglise Saint-Martial de cette ville, fondée et léguée par contrat du 29 janvier 1642, receu par Rousseau, notaire Royal... le jour de l'obit et enterrement de chascun de nous, à tous les pauvres qui se présenteront, un pain de maistail de la valeur d'un sol ou un sol en argent,... à l'hospital saint Michel, cinquante livres pour acheter des matelas et couvertures pour les pauvres qui s'y retireront,... à chascun des couvents des Jacobins, Cordeliers, Capuchins et minimes, vingt-cinq livres, pour deux messes basses par an et un libera à la fin d'icelles pour le repos de nos âmes...
Et quand au surplus, nous avons institué et instituons par cettuy notre présant testamant nostre héritier universel en tous et chascun nos biens meubles et immeubles que- nous délaisserons apprès nos decez led. François Normand, écuier, sr des Bournis, conseilher du roy, juge magistrat au siège présidial d'Angoumois, nostre fils, à la charge de donner en dot à chascune de nos filles, damoiselles Marguerite, Françoise et Madeleine Normand, savoir à lad. Marguerite la somme de quatorze mille livres à prandre sur le prix de la vante de nos offices de recepveur antien, alternatif et triannal du domaine et sureroix de consierge et de jardrinier du chasteau qui nous apartiennent, ou lui délaisser lesdits offices pour seze mille livres, auquel cas elle sera tenue de rendre deux mille livres ; et à chascune des autres deux, douse mille livres, payables, savoir : à lad. Françoise, au port et passage de Basseaux, pour six. mille livres et le surplus en deniers, obligations ou rentes constituées utilles et foncières despandans de nos successions, et à ladite Magdeleine, en la petitte maison à nous appartenant, située en cette ville, paroisse de Saint-Martial, où demeure de présant La Roze, Me sergetier, pour douse centz livres et dix boisseaux de fromant, neuf boisseaux et demie avoine et deux avoués deubs sur les prises du Jalleron et Bellecourre, en la paroisse de Mornat, pour mille livres et le surplus aussi en deniers, obligations, rantes... à la garantie desquelles notre fils s'obligera.
Et quand à Marie Normand, nostre fille aisnée, mariée avec le sr des Menardières, présidant en l'élection de cette ville, attandu qu'elle n'a eu en mariage que la valeur de dix mille livres, nous l'avons rappellée et rappelions par ces présantes à nostre succession, nonobstant la renonciation par elle faite en son contrat de mariage, pour la somme de deux mille livres seulement, payable en la somme de 750 livres que nous avons cy-devant donnée audit Sr des Menardières, et le surplus aussi en obligations de nos successions, voulant qu'au surplus lad. renonciation faitte en lad. manière sorte son plain et entier effect.

Et en cas que nos deux filles ne voulussent suivre et exécutter nostre vollonté et disposition ci-dessus, nous avons fait et fesons par cettuy nostre mesme testamant donnation et advantage aud. sr des Bouillis, nostre fils, de tous nos meubles acquetz... Et l'advantage que nous fezons à nostre fille Margueritte audessus de ses soeurs est en considération des services et peines extraordinaires qu'elle a prises élans la malladie de laquelle lad. damoiselle de Puigrellier, sa mère, est détenue au lit il y a quinze mois. Et pour l'exécution de notre présent testament, nous avons nommé François Aigron, escuier, Sr de Conbisan, conseiller du roy, président. et lieutenant général au siège royal de Cougnac, frère de lad. damoiselle...
Témoins : Pierre Bouillaud, advocat au siège. présidial d'Angoumois, et Me Michel Lucas, procureur aud. siège, et Me Jean Aymard, aussi pr, et Izaac Aygron , me appothicaire dud. Angoulesme.


Du 7 février 1651 (Guyot, notaire à Angoulême)
MARIAGE de Magné et Marguerite Normand.
Henry de Corgniol, escuier, seigneur de Maigné et de Fontenilles, fils de feu Philippe Corgnol et damoiselle Émerie de Moret, femme à présant de Louis Fumée, escuier, sr de la Basinière, demeurant en sa maison de Maigné, en Xaintonge, paroisse de Courcosme, d'une part,
Et François et autre François Normand, escuiers, Srs de Puygrellier et des Bournis, et damoiselle Marguerite Normand, fille naturelle et légitime dud. sr de Puygrellier et de deffuncte demoiselle Marie Aygron, sa mère, demeurantz en la présante ville d'Angoulesme, d'autre part...
En considération duquel mariage, bd. sr de Maigné, a pris et receu, prant et reçoit ladite damoiselle Normand en tous les droitz, qui consistent en la somme de quatorze mille livres qui lui auroit été promise par le testamant de sesdits père et mère du trois désembre mil six cens quarante-neuf, receu par mesme notaire que ses présantes, et à elle délivré par ledit sieur de Puigrellier par contrat passé devant le notaire sousigné, le quatriesme des présant mois et an, savoir la somme de neuf mil quatre cens livres en obligations.., six cens livres en deniers effectifz qui lui ont été baillés et délivrés.., en pistolles, escus d'or et louis d'argent, et en celle de quatre mille livres que lesd. srs de Puigrellier et des Bournis auroient promis lui payer dans un mois, lesquelz néantmoins pour ce personnellement establis de l'exprès vouloir et consantement desd. proparlés ont promis de la paier à l'acquit et descharge dud. sieur de Maigné, aux sieurs de Montigné et Danehé. (du Puy d'Anché, demeurant au bourg de Vansay, en Poitou), dans un an prochain venant, et rapporter l'obligation endossée des quittances du payement pour servir d'hypothèque à lad. damoiselle proparlée...
Coutume d'Angoumois. Régime de la communauté : sur la dot de Marguerite Normand, 12,000 livres en nature de propres ; 300 livres pour son douaire, préfix annuel et viager, franc et quitte de toutes charges ; renonciation aux deux successions de ses père et mère échue et à eschoir, au lirait et advantage de sondit père et, apprès son décès, du sr des Bournis, son frère, et des siens,... reconnais-saut que par le moien de lad. somme de 14,000 livres elle est bien et suffisamment dottée pour tout ce qu'elle pourvoit prétandre...
Les parties ont obligé et hypothéqué leurs biens présants et futurs, mesme lesd. s de Puigrellier et des Bournis, solidairement l'un pour l'autre.
Témoins : Jacques Bonnegent, pâtissier, et Denis Guiot, praticien.
Signé : Henry CORNIOL. Jean HORRIC. NORMAND. Marguerite NORMAND. NORMAND. Marie DE LA ROCHEFOUCAULD. Jean BAJOL. PREVERAUD. Louis DE BARBEZ1ERES. JANSAC. DESRIAUX.


D.
Du 14 avril 1794 (25 germinal an 11)
EXPERTISE ET LOTISSEMENT DU DOMAINE DE MAGNÉ.
... 1er lot. — Composé première de la maison de maistre, qui consiste dans les objets qui suivent :
La porte d'entrée de la basse-cour est voûtée, sur laquelle il y a un petit pavillon ;
A costé et sur la droite est un petit à partement où il y avait autrefois une chapelle ; à costé est une petite chambre, ensuite deux petits à partements ; au coin de ses deux à partements est un four et fourniou servant de boulangerie et buanderie; à costé dud. four est deux petites chambres dans l'une desq. il y a un degré pour monter dans les greniers au-dessus desd. Apartements.
Sur la gauche de lad. porte d'entrée est un degré en pierre pour aller dans led. pavillon et dans un grenier au-dessus d'un petit sellier. Au bout de la basse-cour est un collidor pour entrer dans
les autres chambres ; sur la gauche dud. collidor est une porte qui entre dans la cuisinne ; dans le nord de cette cuisinne est un petit apartement appelé le bac; ensuite est un autre bastiment appelé le sellier.
Dans le levant de lad. cuisine est un sallon boizé qui ouvre sur le jardin ; à costé de se salon, devers le levant, est un petit apartement appelé la dépence.
Sur la droite dudit collidor, il y a deux grandes chambres basses; du même costé du collidor et près de la porte d'entrée est un degré pour monter dans la chambre haute et grenier au-dessus.
Sur la cuisine et salon, il y a trois chambres hautes, deux pour des domestiques et une pour le maistre. Sur les deux grande chambre, il y a trois chambres hautes, deux séparées par des membruts en planche ; celle du fond est renfermée de murs, et un collidor qui règne sur les autres chambres hautes et aboutit à la dernière, et un grenier sur toutes lesdittes chambres hautes ; la basse-cour, qui fait partie desdits apartements et (est) renfermée par les susdits apartements.
A costé desdits apartements, devers le couchant, il y a une grande basse-cour. Le long de cette basse-cour et sur le bord du chemin, il y a des bastiments dans toute la longueur de cette cour, qui sont nouvellement construits et en bon état, qui consiste dans les objets qui suivent : à costé du portail d'entrée de cette basse-cour et sur la droite est une écurie à loger dix boeufs, ensuite est une autre écurie à loger six chevaux ; à costé de cette dernière est un chais où sont les vesseau vinaires, à costé de ce chais est une écurie à loger huit boeufs, ensuite est une grange, à costé de cette grange est encore une écurie à loger huit chevaux ; à l'autre costé de cette basse-cour, devers le midy, il y a une grande gallerie, dans un bout de cette gallerie il y a un toit, au bout de ladite gallerie et toit il y a deux autres toits, ensuite une grande fuie, à costé de cette fuie il y a deux toits pour la volaille et un autre toit sur la gauche en entrant dans ladite basse-cour, près le portail. Plus un jardin à costé du sellier, cuisinne et salon, qui contient 54 carreaux, renfermé de murs, plus un autre grand jardin qui est dans le midy de se petit jardin, du sallon, des grande chambre basse et de la seconde basse-cour, qui contient trois journaux.
Audevant des premiers apartements, du costé du nord, il y a une basse-cour : à chaque bout d'icelle il y a une barrière ; les fermetues, qui estoient en barreaux, sont tombée. A costé de laditte basse-cour et dans le nord d'icelle est une ouche dans laquelle il y a une fuye séparée de laditte basse-cour par une clervoie ; le sur-plus de ladite ouche est refermée de murs, une partie desquels sont très vieux, laquelle ouche contient 160 carreaux.
Confrontant le tout du costé du levant au chemin qui conduit de la fontaine de Magné Gragonne, à droite ; d'autre costé, d'occident, à la terre appelée le Préneuf, ci. après confronté à l'art. suivant ; (l'autre part, du midy, à la garenne demeurée au présent lot, ci-après confronté art. 5 ; d'autre part, du nord, au chemin qui conduit du village de Magné à Bessé, à main gauche, revenant tout ledit dhomaine ensemble 4 journaux 14 carreaux, que nous estimons à la somme de dix mille ivres.
... Une pièce de terre appelée le Préneuf, qui confronte du nord et d'occidant au chemin qui conduit de Magné à Bessé, et du midy à la garenne, 3 journaux 160 carreaux
... La pièce du pré de Lafond, dans laquelle est compris la fontaine et le réservoir, à laquelle fontaine les autres lots auront droit d'y prendre de l'eau et de faire boire leur bétail, au réservoir, 7 journaux 66 ;
Le pré bas qui touche le chemin de Raix à Bessé, à main gauche, 7 journaux 40 ;
La garenne, 18 journaux 131 carreaux, touchant d'un costé, du levant, au chemin qui conduit de Magné à Gragonne, à main droite; d'autre part, d'occidant, au chemain qui conduit de M. à Bossé, à main gauche; d'autre part, du midy, à la terre et chaume ci-après confrontée, appelée la chaume du bout de la Garenne, un chemin de servitude entre deux ; d'autre part, du nord, au jardin et à la terre appelée le Préneuf ;
2° lot. La maison est (et) mesterie la plus près de la maison de maistre,... touchant du costé du levant à la basse-cour demeurée au 3° lot, du nord au chemin qui conduit de l'abreuvoir de Magné à Gragonne, à main gauche...
ART. 11. Champ de la tempeste...
ART. 17. Pièce de terre appelée le champ du simetière et vieille garenne, dans lequel il y en a environ un journal en broussailles, contenant au total douze journaux 74 carreaux, touchant d'une part, du levant, au chemain qui conduit de Raix à Bessé, à main droite; d'autre part, d'occidant, au pré appelé le pré de lisle demeuré au présent lot ; du midy au chemain qui conduit de Magné à la prérie de Raix, à main droite; d'autre part et du nord au cours de l'eau qui dessant de la prérie de Raix au pond de Magné, à main droite.
3° lot. Chambre neufve jusques à la basse-cour demeurée au 2° lot...
4e lot. Chambre basse jusqu'au grand chemin d'Aigre à Ruffec... touchant du costé du levant à la basse-cour au bâtiment demeuré au 38 lot...
31e lot. Un four et fourniou, situé au bourg de Courcosme, qui autrefois étoit le four banal, confrontant à la rue qui va du canton de la liberté à la croix Geoffroy, à main droitte; d'autre part et du nord au ci-devant chasteau dud. Courcosme, une ruette entre deux.

L'adjudication a eu lieu le 28 messidor an II, moyennant le prix total de 302.260 francs, au profit, notamment en ce qui concerne les premiers lots, de divers spéculateurs étrangers à la commune. Pour attribuer à ce prix sa valeur exacte, il faut noter que le domaine de Magné fut affermé, le 18 août 1793, par le directeur du district de Ruffec, pour le prix annuel de 8.100 livres tandis qu'en 1784 Charles de Brouillac l'avait acquis moyennant la rente foncière de 2.000 livres seulement.


Famille de Brouillac,autrefois Bruilhac. (Source J-C Vrillac)
Portait «d’argent, à cinq hermines de sable posées en sautoir»
Cette famille était originaire des environs de Gençay ; Charles de Brouillac, écuyer, seigneur de Saint-Martin d’Entraigues (79), épousa le 22 juillet 1693, Marie-Marguerite de Ceris, soeur du mari de sa sœur, fille d’Alexandre, chevalier, seigneur de Château-Couvert, et de Marguerite de Puyvert des Gittons ; il servit dans le second escadron du ban convoqué en 1703.
Il eut pour enfants :
Charles, qui suit,
Marie-Anne, demoiselle, décédée vers 1734.
Charles de Brouillac, chevalier, seigneur de la Mothe-Comtais, épousa, vers 1730, Marie-Anne de Fleury, fille d’Olivier, écuyer, seigneur de la Raffinière, et de Jacquette-Françoise Cacault, dont il eut Louis-René, qui suit ;

Louis René de Brouillac, chevalier, seigneur de la Mothe-Comtais, laissa de Jeanne de Poispaille, son épouse :
  • 1. Louis-Charles, qui s’est trouvé à l’assemblée de la noblesse du Poitou réunie en 1789, pour nommer les députés aux états-généraux. Il avait servit au régiment d’Auvergne-Infanterie ; émigré en 1791, il servit dans la deuxième compagnie noble d’ordonnance. Il avait épousé Anne-Marie-Enriette d’Aubéri, fille de Jean-Louis-François, écuyer, seigneur du Maurier, et de Aimée-Marie-Françoise de Créquy, dont une fille, Jeanne –Henriette, mariée au mois de janvier 1825, à René-Louis-Frédéric du Pins de la Guérivière.
  • 2. Jacques-Charles, dit le chevalier de Brouillac, seigneur de Magné, émigra en 1791, fit la campagne de 1792 dans une compagnie à cheval des nobles du Poitou, a servi ensuite dans les cadres au service de l’Angleterre destinés à venir secourir les Vendéens. Il épousa à Tonnay-Boutonne, par contrat du 26 octobre 1786, Louise-Henriette-Marguerite Prévost de Sansac de Traversay. Il est décédé en son logis de Magné.
Il avait eu de son mariage, Jeanne-Pauline, née le 17 novembre 1787, mariée le 16 août 1809, à Gabriel-Louis-Joseph Bellivier de Prins.
1 ) Charlotte, qui épousa Sylvain de la Faire, chevalier ; elle est décédée le 26 novembre 1835, dans sa 73e année.
Le logis est en excellent état en 2013.
 


Un bout de généalogie des Corgnol de Magné

CORGNOL Aubert, écuyer, seigneur de Magné (Courcôme), du Montet (Saint-Gaudent - Vienne), Puy de Brux (Brux - Vienne), Parc de Chaunay, Portail de Sigogne, etc...
Il fit un hommage à Chizé et un aveu à Civray en 1466.
Il partagea avec ses frères et soeurs le 10 juin 1483 (Nobiliaire du Limousin).
Il fit hommage au château de Chizé en 1466 et en 1489, pour les fiefs du Portail et du Four de Sigogne (Archives Nationales P. 520, 33 et 40).
Il rendit aveu au château de Civray, à cause de sa femme, pour Puy de Brux, et le Parc de Chaunay, les 15 octobre 1466 et 26 juillet 1473; et du Montet, le 6 juin 1471.
Il renouvela ces aveux comme tuteur de ses enfants, le 20 mai 1474 (Archives Nationales, P. 521, 190-192, et 522, 80-84).
Il fut encore mentionné dans un aveu de 1501, fait par le seigneur de Ruffec (D. F. 82, titres Beauchamp). Cependant, il devait être décédé à cette date.
Il épousa en 1460 Catherine Merlet, fille d'Alain, écuyer, seigneur de Magné, et de N. Bergier du Montet.

De cette union naquirent :

 
 
  • 1) Jean, qui suit.
  • 2) Collin, écuyer, seigneur de Fontenilles. Il épousa Jacquette Bertrand, veuve de Jean Rabaine, seigneur d'Usson.
  • 3) Mathurine, qui épousa Méry de Thoirac. Il décéda en 1503. Elle fit aveu de Saint-Constant au château d'Aunay (Archives Nationales P. 556, 241).
  • 4) Marie, qui épousa Guyot Brun, écuyer, seigneur de la Forêt Mériguet. Ils firent un aveu à Civray le 9 octobre 1501.
Etant veuve, elle échangea Puy de Brux, pour la Barre, cédée par Guy Faubert, écuyer, seigneur d'Oye, le 9 juin 1524.
CORGNOL Jean, écuyer, seigneur de Magné, du Montet, etc..
Il fit aveu à Civray le 27 septembre 1501.(P. 521, 193, jadis scellé de ses armes).
D'après d'autres notes, il fit aveu du Montet dès le 8 février 1498 (Archives de la Vienne).
Le 4 avril 1514, il acquit des terres vendues par Jacques de Bessac, écuyer, par acte passé à Civray.
le 7 mai 1518, il reçut le paiement d'une rente de 8 livres due par le sieur de Miserit.
Il décéda en 1518.
De son mariage en 1483, avec Catherine de l'Age, fille de Jean, écuyer, et d'Isabeau de La Porte, il eut pour enfant :
 
  • CORGNOL Louis, écuyer, seigneur de Magné, du Montet, etc..
Il aveu à Civray le 20 novembre 1519.
Il fut mentionné dans les titres de Courcôme, comme ayant été poursuivi à cause de divers actes de violence, vers 1540-1546. (
Archives de la Vienne, G. 795).
Il épousa en 1520 N., qui lui donna pour enfant :
 
  • 1) Catherine, qui épousa en premières noces, en 1540, Philippe CORGNOL, son cousin, qui fera la seconde branche de Magné.
Elle épousa ensuite en secondes noces le 15 janvier 1558, François de Beauchamp, écuyer, seigneur de Bussac et de Souvigné.

Seconde branche de MAGNÉ :
CORGNOL Philippe, écuyer, seigneur de Magné et du Montet. Il décéda en 1557.
Il épousa en 1540 sa cousine Catherine CORGNOL, fille unique de Louis, de la première branche de Magné.
Ils eurent pour enfant :
  • CORGNOL Louis, écuyer, seigneur de Magné, et Montet, etc..
Il eut un procès en 1578, pour la chaussée du moulin de Magné à Courcôme (Archives de la Vienne, Saint-Hilaire, G. 797).
Il épousa en 1560 N. de Beauchamp, fille de François, écuyer, seigneur de Souvigné, et de Marie de Ponthieu.
De cette union naquirent :
 
  • 1) Isaac, qui suit.
  • 2) N., qui épousa en 1578 Philippe CORGNOL, de la branche principale (XXII).
Il comparut pour son beau-père au procès du moulin de Magné.
Elle décéda sans postérité.
CORGNOL Isaac, écuyer, seigneur de Magné, Fontenilles, Guignebourg, du Montet, etc... Il décéda en 1615.
Il demanda au Roi, par requête du 5 août 1591, des lettres de rescision, au sujet d'un partage qu'il avait signé pendant sa minorité, le 10 septembre 1584, à l'instigation de François de Beauchamp, écuyer, seigneur de Souvigné, son aïeul maternel, en faveur d'une fille née du second mariage contracté par ledit Souvigné avec Catherine CORGNOL, aïeule paternelle d'Isaac (
D. F. 82 Beauchamp).
Il fit divers aveux les 22 février 1598, 14 mars 1609, et 7 décembre 1611.
Il épousa en 1590 Renée d'Alloue, dame de Bourbon, fille de René, écuyer, seigneur de Chestellus, et de Florence de Barbezières.
De cette union naquirent :
 
  • 1) Philippe, qui suit.
  • 2) Florence, qui épousa le 22 mars 1622, Etienne de Barbezières, écuyer, seigneur de Montigné.
  • 3) Jacquette, qui épousa le 16 avril 1617 François du Mas, écuyer, seigneur de Roussillon.
  • 4) François.
CORGNOL Philippe, écuyer, seigneur de Magné.
Il fit aveu en 1618 et 1630 pour Fontenilles.
Il fit accord conjointement avec sa soeur Florence, le 4 décembre 1623, au sujet des dettes de la succession de leur père.
Il céda le Montet à Charles Desmier, écuyer, seigneur des Fenêtres (Charmé).
D'une alliance inconnue, (
Beauchet et Filleau disent qu'il épousa vers 1630, Emerie de Morel qui se remaria en 1634, avec Louis Fumée, écuyer, seigneur de la Bazinière).
Il eut au moins :
CORGNOL Henri, chevalier, seigneur de Magné, Fontenilles. Il décéda en 1675.
Il fut parrain à Nanclars, le 23 décembre 1646.
Il passa un acte le 5 octobre 1663, devant Renaud et Gurat, notaires (
Archives de la Charente).
Il épousa à Saint-Martial d'Angoulême, le 13 février 1651 (
Nobiliaire du Limousin), Marguerite Normand, fille de François, écuyer, seigneur de Puygrelier, et de Marie Aigron. Devenue veuve, elle transigea avec ses filles et leurs maris, le 18 novembre 1675 (Archives de la Charente E. 998).
Ils eurent pour enfants :
1) Emerie, dame de Magné, qui épousa le 7 mars 1666 (
Marreau, notaire à Juillé), Henri de Volvire, chevalier, seigneur du Vivier et de Touchabran.
2) Madeleine, qui épousa Antoine du Souchet (
décédé en 1713), écuyer, seigneur du Villard. Elle en était veuve, le 15 avril 1713 (Archives de la Charente E. 1051).

Corgnol et la justice

AD 16 B1 980 (1)
SENECHAUSSEE ET PRESIDIAL D’ANGOUMOIS
LE SEIGNEUR DE MAGNE
7 décembre 1648
Audition d’Henry Corgnol, 25 ans, écuyer, Sieur de Magné, y demeurant, en Xaintonge.
Interrogé sur les plaintes faites contre lui par Monsieur Pierre Bouquet, juge ordinaire de la châtellenie de Villefagnan, Monsieur Louis Bouquet son fils, curé de l’église paroissiale de Villefagnan et Jean Guyon, Sieur de Goize, répond (Henry Corgnol) qu’un certain jour du mois d’août 1648, s’en allant au lieu de Fontenille, en la compagnie de deux gentilshommes ses amis, il fit rencontre dudit Guyon qui battait à coups de bâton une pauvre femme du bourg de Juillé qui mendie son pain journellement.
Le répondant (Henry Corgnol) lui ayant demandé le sujet qui le portait à battre cette femme, ledit Guyon lui dit que c’était une larronne et avait dérobé son bled. Ce qui obligea le répondant (Henry Corgnol) d’aller demander aux métiviers qui coupaient du bled dans les champs proches dudit lieu si ladite femme avait pris et dérobé de leur bled. Lesquels lui dirent que non, si bien que le répondant, indigné de trouver ledit Guyon si fourbe, il lui donna deux ou trois coups de plat d’épée, sans néanmoins l’avoir blessé ni fait grand mal ; et de ce fait, continue son chemin et se retire audit Fontenille avec sa compagnie, n’ayant point eu de bruit et de différend avec ledit Bouquet fils, ayant bien eu querelle avec ledit Bouquet père, y ayant longtemps, pour raison de la chasse, mais aucuns de leurs amis les auraient accommodés.
Interrogé si depuis ledit accommodement, il (Henry Corgnol) n’a pas continué de faire des violences aux promouvant, notamment ledit Bouquet père qu’il aurait battu et excédé, l’ayant trouvé sur un grand chemin, n’ayant point eu de considération de son âge et caducité, et que lui qui répond en son juridicq a dit avoir battu ledit Pierre Bouquet père à raison des insolences qu’il lui avit commises, mais cette action a laissé au moyen de l’accommodement qui fut fait par le Seigneur de Bayers, et ce longtemps avant la présente action.
Interrogé si lui qui répond (Henry Corgnol) n’a pas souventes fois pris et fait prendre par ses serviteurs, les chevaux et juments qui étaient dans la prairie de Villefagnan, a dit qu’ayant trouvé à plusieurs fois trois montures appartenant auxdits Bouquet qui étaient dans les bleds du répondant et y faisaient grand dommage, il les fit serrer, et néanmoins les Bouquet les auraient faites reprendre.
Interrogé s’il n’a pas travaillé les dites montures à diverses fois à la chasse, répond qu’une fois, ayant trouvé une jument du promouvant qui était dans les bleds du répondant, qui y faisaient grand dommage, voyant que les dits Bouquet ne tenaient compte d’empêcher qu’elles ne fassent dommage à ses bleds, il la fit prendre et la fit courir à la chasse pendant une journée. Et puis, l’a remise sans lui faire autre mal.
Interrogé si lui qui répond, assisté d’un sien serviteur, armés d’épées et pistolets, ne seraient pas allés dans la maison dudit Bouquet père, où étant, le répondant (Henry Corgnol) ayant dessein de tuer icelui Bouquet, aurait fait monter par une fenêtre son valet, qui serait entré dans la chambre où couche ledit Bouquet père, lequel ayant rencontré, il empêcha au moyen de son fils et gendre qu’il ne lui fut fait aucun mal, ayant usé de beaucoup de douceur envers le répondant pour modérer sa fureur.
Lui ayant remontré qu’il déguise la vérité, y ayant charges au procès qu’à plusieurs fois il s’est jacté que s’il trouvait les promouvants il les tueraient, et que le sixième du mois d’août dernier, ayant fait rencontre dudit Guyon qui était allé voir ses métiviers à la ferme qu’il tient du prieur de Juillé, étant au dessus de la Croix de Juillé, le répondant l’aurait joint, assisté de trois hommes à cheval, armés d’épée et de pistolets, lequel répondant aurait grièvement battu et excédé ledit Guyon de coups d’épée et de pieds.
Etaient avec lui les Sieurs Denchel, de Chervaix et Chauffour.

En 1820, Raix possédait deux moulins à vent au sud du bourg.
 
AD 16 B1 995 (1)
SENECHAUSSEE ET PRESIDIAL D’ANGOUMOIS
LE SEIGNEUR DE MAGNE MALTRAITE, SON VALET TUE
5 avril 1663
Plainte d’Henry CORGNOL, écuyer, sieur de Maigné et des Fontenilles, et de Philippe VERNEUIL à Pierre DAVID, écuyer sieur de BOISMAURAND, Lieutenant juge et magistrat criminel en la sénéchaussée d’Angoumois.
disant que le sieur de Boismorin, ayant conçu une inimitié contre lui pour cet effet, ayant fait emploi de plusieurs de ses parents et amis ramassés en plusieurs endroits et particulièrement de Villefagnan et des environs, il les aurait assemblés et retirés en sa maison proche du bourg de Villefagnan d’où il les aurait fait partir ce jourd’huy dès la pointe du jour pour assassiner ledit sieur de Maigné et ses dits valets.
Lesquels gens ramassés, à pied et à cheval, tous armés de fusils, mousquetons, épées et pistolets, il aurait divisé en trois parties ; une desquelles il aurait posé proche le moulin de Raix, et les autres derrière le moulin à vent qui est des dépendances de ladite seigneurie de Maigné, avec ordre expresse de coure sus audit sieur de Maigné, le voyant sortir de sa maison pour aller à la chasse, où il irait indubitablement parce qu’il faisait beau temps.
Et il aurait réservé 7 ou 8 autres auprès de sa personne, lesquels seraient partis à la maison dudit sieur de Boismorin environ les 11 heures ou midi, pour aller relever les autres et voir ce qu’ils auraient fait.
Et s’étant les sieurs de Boismorin et sa troupe approchés à la portée d’un mousquet de la maison dudit sieur de Maigné, et entre ladite maison et le bourg de Courcôme, sur une éminence qui regarde en ladite maison de Maigné, ils l’auraient vu sortir allant à la chasse avec le sieur de RODAS et ledit feu Jean VERNEUIL son valet de chambre.
Ce qui aurait obligé ledit sieur de Boismorin et ceux de sa suite, ses complices, au nombre de 9 cavaliers et d’u homme à pied, tous armés d’attendre les sieurs de Maigné sur le grand chemin de Marcillac1 à Ruffec, et aux égaux des bois et garenne de Pied de Vache, où il suivait ses chiens courants, monté sur un petit bidet2 rouan3.
Et au même instant, auraient couru sur lui et son dit valet de chambre, qu’ils auraient assassiné de coups de fusil, mousqueton et pistolet.
(Ensemble la dame de Maigné sa femme et la demoiselle de Bourbon, sa fille aînée.)
Ce fait, seraient retournés au corps dudit Jean VERNEUIL, lequel ils auraient foulé aux pieds et donné plusieurs coups après sa mort, par une cruauté barbare.
Le sieur de Maigné se plaint donc de ce crime, ainsi que le père de Jean VERNEUIL, tous deux par la voix de leur procureur requis, et demandent au Sieur de BOISMAURAND de se rendre à Maigné où le corps de Jean VERNEUIL a été déposé dans la chapelle du lieu.
Le lendemain, vendredi 6 avril 1663, le sieur de BOISMAURAND, son greffier, Cybard COURAUD maître chirurgien à Angoulême, et 8 archers montent à cheval et se rendent à Maigné.
Ils partent vers 6 ou 7 heures du matin (7 lieues de distance). Ils arrivent vers les 3 ou 4 heures du soir, où était le sieur de BOISMAURAND reçoit la plainte de Henry CORGNOL.

Plainte de Henry CORGNOL, vendredi 6 avril 1663. (uniquement les compléments à la plainte du 5 avril 1663)
Henry CORGNOL avait accoutumé d’aller à la chasse aux environs de sa maison, n’osant pas se commettre à de plus longues courses, à cause de la goutte qui l’afflige depuis quelque temps.
Et ledit BOISMORIN averti qu’il n’était point sorti , il serait lui même monté à cheval ; y avait fait monter son fils ; le nommé POITEVIN, maître de la poste de Villefagnan et ses 3 enfants nommés le LOUBEAU, LESPINIERE et DESMALTES ; et le sieur de La Touche fils du sieur de CHASSAIGNE ; le nommé DESNOHIERS du lieu de Villefagnan ; LHOUMEAU fils de DESCOUDRE ; le frère de LANATTE, et autres ses complices pour guetter et assassiner ledit sieur de MAIGNE et ses valets.
Etant en embuscade derrière le moulin à vent de la seigneurie de Raix et dans les bois qui sont aux environs.
Ayant vu qu’il était sorti de sa maison avec le sieur de RODAS et le fils de Jean VERNEUIL son valet de chambre et six briquets4.
Etant seulement éloigné d’une portée de mousquet environ de sa maison, proche le plantier de Roumeilly et du bois et garenne de pied de Vache, sur le grand chemin de Marcillac à Ruffec, ledit BOISMORIN et son fils, et leurs complices, seraient sortis de derrière ledit moulin et des bois qui sont aux environs et auraient poussé à lui en criant « tue, tue ! mordieu !» et d’abord auraient assassiné et tué ledit Jean VERNEUIL son valet, éloigné de 8 à 10 pas de lui.
L’auraient obligé, pensant sauver sa vie, de prendre la fuite. Mais parce qu’il était seulement monté sur un petit bidet rouan de peu de valeur, ledit Boismorin et ses complices qui étaient avantageusement montés, lui auraient coupé le chemin et joint dans les champs, un peu au dessus le grand chemin on va de Maigné à Courcôme.
Ledit BOISMORIN, en l’abordant, lui aurait tiré un coup de pistolet qui tire deux coups, qui aurait donné dans son chapeau qui serait tombé par terre, l’auraient ensuite démonté5, donné plusieurs coups de bouts de leurs fusils et mousquetons dans le ventre (et ailleurs) et l’auraient traîné au travers des champs, et le long dudit chemin de Maigné à Courcôme, le traînant par ses cheveux et sa cravate qu’ils déchirèrent et mirent en pièces avec ses habits.
Où faisant effort pour sauver sa vie, il6 se jeta au dessus d’une muraille dans un champ et dans des fossés pleins d’eau, et de là, dans les prés de Patrot où lesdits BOISMORINet complices l’ayant encore poursuivi et attrapé.
Mais la dame de Maigné, sa femme, la demoiselle de Boubon sa fille aînée, et plusieurs autres personnes tant dudit bourg de Courcôme que des environs, étant venus, ils l’auraient tiré et arraché des mains dudit BOISMORIN.
(et après qu’ils eussent donnés des coups à la femme et à la fille du déposant.)
(des témoins confirment ce qui est dit dans les plaintes.)

10 mai 1663
Requête présentée à Pierre DAVID, sieur de Boismaurand, assesseur du Vice Sénéchal d’Angoumois, Lieutenant Criminel de robe courte d’Aunis et Gouvernement de La Rochelle, à Angoulême,
Par Henry CORGNOL, écuyer, sieur de Maigné7 et des Fontenilles, disant que Daniel BOUQUET, sieur de Boismorin, ayant de longtemps conspiré d’assassiner le suppliant, aurait mis son dessein à exécution le 5ème du mois d’avril dernier, l’ayant attaqué au dessous de sa maison, tué Jean VERNEUIL son valet de chambre, et tiré au suppliant un coup de pistolet qui aurait brûlé son chapeau et percé de balles en plusieurs endroits, aussi qu’il nous est connu par l’information que nous avons faite et procès-verbal du corps dudit VERNEUIL.
Et parce que la rage et la fureur dudit BOUQUET ne finit pas, et de plus il conçoit une haine nouvelle contre ledit sieur de Maigné.
Mardi dernier, 8ème du présent mois, environ soleil levé, ledit de BOISMORIN, accompagné de 14 hommes armés de pistolets, fusils et mousquetons, fut roder autour de la maison dudit sieur de Maigné, passa et repassa dans sa garenne qui joint son jardin, pour l’obliger à sortir, et exécuter le dessein qu’il a conçu contre sa vie, tira et fit tirer des coups de fusil dedans.
Après quoi, voyant que le suppliant ne paraissait pas, ledit BOUQUET et ses complices passèrent par le bourg de Raix et se retirèrent dans sa maison à Villefagnan, laquelle il a fait fortifier et tient garnison dedans pour empêcher que nos décrets de prise de corps ne soient mis à exécution contre lui et ses complices.
(Le suppliant demande que cette plainte soit jointe à la précédente.)

AD 16 2E 2138
RENON notaire à GARAT
3 Août 1663
Messire Henry CORGNOL, chevalier, seigneur de Magné, Fontenille et autres places, demeurant en sa maison noble de Magné, paroisse de Courcôme, en Saintonge.
Et Philippe VERNEUIL, marchand, demeurant en ladite ville de Confolens en Angoumois.
Constituent pour leur procureur général et spécial monsieur Maître François NORMAND, écuyer, sieur de BOURNIS, conseiller au siège Présidial d’Angoulême.
Et lui donnent pouvoir de passer compromis avec Daniel BOUQUET, écuyer, sieur de BOISMORIN, Pierre POITEVIN maître de poste à Villefagnan, Daniel, Jean et Pierre POITEVIN, Pascal GIRARDIN, La SALLE, LHOUMEAU et LAROCHE.
Pour juger et arbitrer tous les procès criminels qui sont entre eux (sans réserve) pendants par-devant le Lieutenant Criminel d’Angoulême, vice Sénéchal dudit lieu, Cour de Parlement de Paris et autres juridictions, par l’avis de deux avocats dont l’un sera choisi par ledit sieur Procureur constitué et un autre par ledit BOIMORIN et consorts.
Passé au village de la Croix-Geoffroy, Marquisat de Ruffec, en Angoumois (4 pages).

5 octobre 1663
CORGNOL et VERNEUIL après avoir eu lecture de la sentence arbitrale rendue sur les procès criminels qu’ils avaient tant au Parlement de Paris (qu’à Angoulême) contre Daniel BOUQUET, sieur de Boismorin et autres que ceux que ledit BOUQUET avait contre eux.
Sentence arbitrale du 20 septembre 1663.
Acceptent ladite sentence.

AD 16 B1 1001
SENECHAUSSEE ET PRESIDIAL D’ANGOUMOIS

LE SIEUR DE BOISMORIN CONTRE LE SEIGNEUR DE MAGNE
(l’inverse de la plainte B1 995 (1))
5 avril 1663
A nos seigneurs du Parlement.
Supplie Daniel BOUQUET, écuyer, sieur de Boismorin, disant que pour raison de l’assassinat commis en sa personne, il a obtenu sentence de mort du Lieutenant Criminel d’Angoulême le 13 mars 1662, à l’encontre des nommés Charles DEXMIER, sieur du Montet, POISSON sieur de Lavaud, et LALLEMENT valet de DEXMIER, laquelle porte décret de prise de corps à l’encontre de CORGNOL, sieur de MAGNE, confirmée par arrêt de la cour du 31 juillet.
En vertu desquelles sentences et arrêts, le suppliant aurait fait tous ses efforts pour les faire capturer, ce qui lui aurait été impossible, au moyen de ce qu’ils s’attroupaient plusieurs ensemble, aucuns prévôts, archer ou sergent n’ayant voulu entreprendre de les arrêter.
Même, ils auraient depuis cherché toutes sortes de moyens pour tuer et assassiner le suppliant, lequel pour tacher de se mettre à couvert de leurs mauvais desseins et de faire mettre à exécution ladite sentence, aurait baillé sa requête à la Cour, sur laquelle serait intervenu arrêt le 19 décembre 1662, par lequel il est enjoint aux prévôts des maréchaux, aux lieutenants, exempts8, archers et autres officiers de justice, de prêter main forte à l’exécution desdits arrêts et sentences.
Et permis au suppliant de s’assister de tel nombre de personnes qu’il jugera à propos, armés d’armes à feu.
En haine de quoi, ledit DEXMIER et autres ses complices qui ont protesté et juré à diverses fois de tuer le suppliant jusque dans sa maison, seraient venus la nuit du vendredi 30 mars dernier venant au samedi, devant sa maison, où ils auraient fait heurter à sa porte au moment de quoi il aurait mis la tête à la fenêtre pour savoir ce que c’était. Et en même temps l’on aurait tiré plusieurs coups de fusil et pistolet pour le tuer, dont il se serait garanti avec le plus grand bonheur du monde, ayant crié « au voleur ! » et les voisins s’étant levés, les dits de MMONTET et complices, entre lesquels le nommé PETIT JEAN, valet dudit MAIGNE9 fut reconnu, s’en seraient enfuis.
Dont le suppliant aurait fait informer par devant le prévôt de Cognac, lequel il aurait chargé desdites sentences et arrêts pour les faire capturer et se mettre à couvert de leurs violences.
Et à cette fois, ledit prévôt se serait transporté le 3 du présent mois d’avril au lieu de Montifaud, demeure dudit MONTET, lequel il n’y aurait rencontré. Mais aurait appris que lui et ses complices étaient dans la maison du sieur de BOISJOLY, père dudit LAVAUD, où ledit prévôt se serait acheminé.
Et étant arrivé, voulant faire perquisition et recherche de leurs personnes, il y aurait bien trouvé de l’obstacle par le moyen dudit BOISJOLY, père dudit LAVAUD, dudit MAIGNE et dudit PETIT JEAN son valet, lequel PETIT JEAN aurait acquaré10 un fusil audit prévôt, et lesdits MAIGNE et BOISJOLY auraient dit en jurant que lesdits G MONTET et complices avaient eu grand tort de n’avoir pas tué le suppliant lorsqu’ils l’attaquèrent au lieu de Ruffec, et qu’ils leur conseillaient de le tuer et assassiner partout où ils le trouveraient, même d’aller jusque dans sa maison pour ce faire.
Et même ledit MAIGNE dit que là où il le rencontrerait, il le tuerait…
Dont ledit prévôt aurait dressé son procès verbal dudit jour du 3 avril.


Ce qui marque une animosité toute extraordinaire dudit MAIGNE qui procède de ce que dessus et de ce que le suppliant a informé il y a quelques années contre lui, en qualité de prévôt de messieurs les Maréchaux de France pour raison de viols et crimes énormes, de manière que ledit MAIGNE, le 5 du présent mois, icelui suppliant étant à la chasse de ses lévriers pour faire courre au lièvre dans la plaine du Pied de Vache, paroisse de Courcôme, appartenant aux chanoines de Saint Hilaire , le Grand de Poitiers, fief du sieur de VOUILLAC, éloigné de la maison dudit MAIGNE de 3000 à 4000 pas, une prairie entre deux, ensemble la Garenne en bois taillis dudit sieur de VOUILLAC, ledit suppliant ayant avec lui son fils, jeune écolier de 15 à 16 ans, et six de ses amis, et un valet de pied pour la sécurité de sa personne, comme il lui est permis par le susdit arrêt du 19 décembre dernier.
Il fut tout surpris qu’il ouït grand bruit du côté d la maison dudit MAIGNE, et comme des voix menaçantes, et aussitôt il aperçut ledit MAIGNE qui venait du côté de la garenne.
Et en même temps, vint couper tout d’un coup le devant au suppliant, proche de ladite garenne d’environ 300 pas.
Et s’adressant à lui en jurant lui dit qui l’avait fait si hardi de venir chasser à la vue de sa maison.
Le suppliant lui aurait répondu qu’il n’était en rien du sien, et qu’il serait bien marri mais qu’il voyait bien que ledit MAIGNE était venu pour exécuter les menaces qu’il avait faites de le tuer.
Et en effet, ledit MAIGNE dit qu’il l’empêcherait bien de chasser et qu’il le tuerait. Et voyant bien que le suppliant était hors de défenses, étant estropié de sa main droite, le susdit assassin sans autre discours lui aurait accaré11 son fusil qu’il avait bandé sur l’épaule, lequel il lui aurait lâché d’environ 30 pas, que le suppliant aurait évité.
Et en même temps, ledit MAIGNE aurait poussé à lui le pistolet à la main, qu’il lui aurait encore lâché à bout touchant dont l’attache de sa manchette et sa dite manche et manche de chemise auraient été brûlées.
Et pendant ces violences, 2 valets dudit MAIGNE tirèrent 2coups de fusil au fils du suppliant, lesquels coups lui auraient percé son chapeau et blessé son cheval.
(Voir B1 995 (1))

7 Mai 1664
Audition de HENRY CORGNOL, 40 ans, écuyer, seigneur de Maigné et de Fontenille, demeurant audit lieu de Maigné, paroisse de Courcôme, en Xaintonge, catholique, faite par le Lieutenant Criminel d’Angoumois.
En conséquence de l’arrêt donné au privé Conseil du Roi le 15 octobre 1663, entre lui, demandeur en crime d’assassinat contre Jean Daniel BOUQUET, écuyer , sieur de Boismorin, Pascal GIRARDIN, Jean REGNIER, Pierre MAROT, Pierre, Daniel autre Pierre et Jacques POITEVIN, accusés ( ?) et ledit Daniel BOUQUET, accusateur, et ledit sieur de MAIGNE, accusé.
Interrogé s’il ne sait pas que ledit BOUQUET aurait été assassiné en la ville de Ruffec par Charles DEXMIER, écuyer, sieur du MONTET, LAVAUD POISSON et le nommé LALLEMENT, contre lesquels il a obtenu sentence par nous rendue portant condamnation à mort, qui a été confirmée par arrêt de la Cour.
Répond qu’il sait que les BOUQUET ont eu quelques démêlés avec les sieurs DUMONTET son parent.
Interrogé s’il n’était pas complice dudit assassinat et aurait aidé à conduire lesdits complices et leur donna retraite en sa maison.
Fait dénégation : il est vrai qu’on décréta contre lui pour s’être trouvé seulement le lendemain en la ville de Ruffec sans qu’il eut fait autre chose que d’aller visiter un parent. Dénie d’avoir jamais donné de retraite dans sa maison à aucune personne prévenue de crime, et que lesdits sieurs DUMONTET, LAVAUD et LALLEMENT n’y ont jamais couché deux nuits de suite.
Il n’a jamais fait que des actions que d’homme d’honneur et de sa condition, dénie d’avoir commandé à défunt Jean VERNEUIL son valet de faire cette action12.
Interrogé si la nuit du vendredi 31 mars 1663 (coups de feu à la fenêtre de BOUQUET), dénie l’interrogatoire et que son valet ne serait point sorti de sa maison ladite nuit, au moins qu’il ait pu savoir. Et ne croit pas qu’il y ait des gens de bien qui puissent déposer d’avoir vu son valet à Villefagnan, ladite nuit.
Interrogé sur la perquisition du prévôt de Cognac à Montifaut et dans la maison de Boisjoly, père de LAVAUD, ledit jour, revenant dans son carrosse avec sa femme et sa fille aînée de visiter de visiter la demoiselle du Rocq qui avait perdu sa mère, suivi de son valet à cheval, et d’un petit laquais, ils furent dîner chez le sieur de Boisjoly. Où étant, le prévôt de Cognac y arriva, assisté de à personnes armées, leur abord ayant fait beaucoup de bruit, il se peut faire que défunt Jean VERNEUIL, son valet, ait pris son fusil. Ne sait pas s’il l’accara à quelqu’un, sait bien qu’il lui défendit de faire du mal à personne, s’étant rencontré audit lieu par hasard, et dans un équipage contraire à celui d’un homme qui a de mauvais desseins, ayant sa femme et sa fille avec lui.
Il a fait tout ce qu’il a pu pour accorder ledit sieur Du MONTET avec ledit BOUQUET.
Le sieur BOUQUET et 9 de ses complices seraient venus l’attaquer de guet-apens comme il chassait autour de chez lui et lui auraient tué son valet.
N’ayant pas d’apparence que le répondant qui avait monté un bidet eût voulu attaquer ledit BOUQUET.
Etant inouï que ledit BOUQUET, tenancier13 du sieur de Maigné, dont la naissance est infiniment au dessous de la sienne, puisse prétendre avoir droit de chasser jusqu’à sa porte, puisque la bienséance pratiquée par le gentilhomme et les règlements de messieurs les maréchaux de France leur défend, les civilités préalables d’en user de cette sorte.
Signifié à Rocq Benoit, procureur dudit sieur BOUQUET, qui n’a fait de réponse.
Nota : pour la seigneurie de Magné, voir étude BSHAC de 1888.

Notes
1 Ce chemin, à mi-chemin entre Raix et Courcôme, relie la RD 27 à Magné et à la Faye.
2 Petit cheval de selle.
3 Se dit d’un cheval dont les crins sont noirs et la robe formée de poils rougeâtres et de poils blancs.
4 Chien courant de petite taille.
5 Désarçonné.
6 Henry CORGNOL.
7 Village de MAGNE, commune de Courcôme, alors en Saintonge.
8 Ancien officier de police.
9 Henry CORGNOL.
10 Accaparé.
11 Accaparé.
12 Tuer Jean BOUQUET.
13 BOUQUET tenait sa terre en roture dépendante du fief de Magné.
 
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