Le monument aux morts se situe en face de l'église sur la place.
Une plaque est apposée dans l'église.
Journal de Ruffec
La Chèvrerie inauguration du monument.
Le dimanche 13 novembre 1927, aura lieu à La Chèvrerie, l'inauguration du monument élevé à la mémoire des enfants de la commune qui sont morts pour la France. M. Poitou-Duplessy, député, assistera à cette cérémonie.
Journal de Ruffec, 27 novembre 1927
La Chèvrerie inauguration du monument aux morts.
En dépit des bruits de discorde et de haine qui semblent vouloir monter d'un peu partout, il fait bon se retrouver parfois dans une atmosphère de paix, de calme, ou des hommes de confessions et d'opinions différentes, vivent de la même vie, méditent la mime pensée, aiment d'un même amour. C'est un jour semblable qu'ont vécu le 13 novembre dernier, les habitants de La Chèvrerie et leurs nombreux amis, venus se joindre à eux pour assister à l'inauguration du monument élevé à la mémoire des quinze héros, enfants de cette commune, tombés pour le Pays.
Le matin, à 11 heures, un service religieux fut célébré en l'église paroissiale. Le conseil municipal, les anciens combattants et une assistance nombreuse et émue, y étaient venus apporter le tribut de leur reconnaissance ou de leurs prières à la mémoire toujours vénérée de leurs glorieux morts.
A 2 heures 30, au premier son de cloche, l'église se remplit à nouveau et pendant le chant des vêpres des morts, le cortège, officiel se forme à la mairie, pour recevoir et accompagner au monument, pour la bénédiction et l'inauguration, M. le député Poitou-Duplessy, toujours heureux d'apporter en pareille circonstance, le témoignage de sa fidèle reconnaissance à ceux qui sont morts pour la Patrie, et l'assurance de sa sympathie à ceux qui les pleurent.
En quelques minutes, une assistance qui peut être évaluée à plusieurs centaines de personnes, dans un ordre parfait, entoure le monument pavoisé aux couleurs nationales, et au pied duquel les anciens combattants ont déposé des couronnes et des fleurs.
Avant la bénédiction, M. l'abbé Petit, curé d'Embourie, ancien combattant, blessé de guerre, prend la parole pour dire à ceux qui pleurent que leurs larmes ne doivent pas être sans espérance parce que le soldat, tombé au champ d'honneur, n'est pas mort tout entier, et qu'au fond de son tombeau il repose, parle, attend. Son corps mutilé, sublime sentinelle, continue de monter la garde et veille sur le Pays et ses berceaux, pendant que son âme immortelle, en attendant l'au-ravoir de tous les siens et la résurrection de tous les morts, jouit dans le sein de Dieu de la récompense accordée à l'amour qui s'immole. Et ce sont les leçons que nous ont laissées nos morts, leçon de désintéressement et de sacrifice de soi, leçon d'amour et de fraternité entre tous les Français sans exception, leçon de fidélité dans le souvenir dont le plus sublime exemple est « la vieille Maman Française ».
Après la bénédiction donnée par M. le Curé de Bernac, M. le Maire fait l'appel, toujours si émouvant des morts, auquel un ancien combattant répond par ces mots « Mort pour la France » et la parole est-donnée à M. Busserolle, au nom des anciens combattants, qui avec émotion glorifie les enfants de cette commune morts pour la Patrie. Il retrace dans un style sobre, émouvant, la mobilisation, l'enthousiasme du soldat ; il le montre héros impassible devant le danger, mais fils aimant, père tendre, luttant jusqu'à la mort pour que les horreurs de la guerre soient épargnées à la génération qui monte, symbolisée par les chers petits dont il revoit le regard aimé avant de s'endormir de son dernier sommeil. Il évoque le souvenir de tous nos glorieux morts, nous criant de tout faire pour éviter les horreurs de la guerre.
A son tour M. Poitou-Duplessy prend la parole, se dépouillant nous dit-il « de son caractère d'homme politique » il est venu apporter à ses glorieux camarades, le témoignage ému de son admiration et de son souvenir. De sa parole chaude, il affirme que plus que tous les autres citoyens, les anciens combattants veulent la Paix, que plus que tous ils ont horreur de la guerre, et feront tous les sacrifices compatibles avec la sécurité du Pays pour éviter une nouvelle effusion de sang, mais que pour atteindre ce but « des phrases dont la sonorité ne saurait cacher le vide » ne leur suffisent pas, il leur faut des actes ; et, dans une superbe envolée, laissant parler son coeur de grand Français, il magnifie l'héroïsme du soldat Français, fantassin, artilleur, brancardier, marin, aviateur, de la femme française, tant au foyer, que penchée dans les ambulances du front ou les hôpitaux de la métropole, sur les plaies béantes de nos blessés et de nos mourants, dont elle fermait les yeux, avec tant de douceur, que le pauvre agonisant en exhalant son dernier soupir, croyait voir la visage aimé de sa mère, de son épouse ou de sa fiancée. Et puis c'est l'éloge du Paysan Français à qui les pêcheurs en eau trouble promettent tout et ne donnent rien, lui qui, le premier de tous dans la paix donne sa vie au Pays, et la lui conserve avec sa poitrine durant la guerre. Et enfin c'est le conseil de l'homme qui sait et qui voit. Aimons la paix et détestons la guerre, mais pour éviter la guerre faisons la paix entre citoyens du même pays d'abord. Pour clôturer cette émouvante et réconfortante cérémonie, M. Barret, maire de La Chèvrerie, en quelques mots du coeur, remercie toute l'assistance, le généreux donateur du terrain où est édifié le monument aux morts, M. le Général de Champvallier, de la part qu'il a prise à l'organisation de cette fête, MM. les Membres du Clergé, MM. les Orateurs, dit son salut respectueux aux Grands Morts de la commune et de tout le Pays et termine en criant « Vive la France ».
Ils sont morts pour la France